Entre rage et désespoir...[libre]

Dans ce lieu humide où seules les lumières blafardes des néons venaient quelque peu éclaircir la pénombre, un bruit retentit. Le son, presque cristallin, d'un objet en train de se briser en mille morceaux se fit entende. Bientôt suivi par un autre et encore un autre... Puis enfin, le vacarme assourdissant d'une armoire que l'on renverse. Là, aux fins fonds de ces égouts, perdu dans ce refuge précaire, l'espace qui avait été aménagé en infirmerie une mince silhouette semblait laisser éclater sa rage et dévastait absolument tout ce qui lui tombait sous les griffes. La jeune femme écumait et ses cheveux noir de jais retombaient en bataille sur ses yeux d'or alors qu'elle s'acharnait et envoyait valser contre le mur les dernières fioles et autres bouteilles encore intactes. Vides ! De toutes façon celles ci étaient toutes vides !

Lorsqu'elle eut fini de mettre a sac cet endroit qu'elle n'avait pas quitté depuis des jours, la jeune femme sembla enfin se calmer. Neela vint s'adosser à un mur, le regard sombre et , tout doucement se laissa glisser jusqu'au sol. La tête appuyée contre ce mur qui suintait encore d'humidité elle ramena ses genoux contre sa poitrine et laissa échapper un long et profond soupir. Elle était si lasse subitement ! La tension des derniers jours s'échappait aussi surement que le dernier souffle de vie quittait le corps des deux créatures étendues sur les lits de fortune se trouvant devant elle. Ses lèvres se mirent à frémir sans qu'elle puisse les en empêcher, ses yeux se fermèrent un instant. Une larme glissa sur sa joue pour venir achever sa course dans son cou grâcile. Bientôt d'auttres suivirent et le visage de la jeune créature en fut bientôt baigné.

Pendant un instant, elle laissa ses pleurs couler, éprouvant un si vif et si profond sentiment où se mêlaient aussi bien l'impuissance que l'injustice et la colère. Puis essuyant, d'un revers de la main ses larmes, Neela se releva et s'approcha des lits où reposaient les deux corps froids et sans vie des deux créatures. Presque avec tendresse, elle caressa le pelage soyeux de la femme panthère qui semblait à présent si sereine. Un sourire paisible illuminait le visage de la morte qui tenait serrée dans la sienne la si petite main de son enfant mâle, décédé lui aussi.

-" Pardonnez moi... J'ai fait de mon mieux pour vous sauver mais vos belssures étaien trop profondes... Je ne pouvais rien faire ! Rien... murmura t'elle la voix tremblante d'émotion. Elle ferma les yeux des deux morts et puis ajouta, son regard fixé sur le petit corps à jamais inertes du petit garçon : Puissiez vous trouver dans le repos éternel la liberté et la paix que la vie vous aura refusés... "

Puis, d'un geste devenu presque machinal chez elle, elle tira un drap sur eux. Neela jeta un regard attristé sur ses mains que de sombres tâches rouges sang étaient venues, une fois de plus, souiller. Puis son regard froid vint se poser sur les éclats de verre qui jonchaient le sol. Tout cela lui paraissait si cruellement injuste ! Elle avait si peu de moyens pour venir en aide aux blessés qu'on lui amenait ! Noah et les autres faisaient de leur mieux pour lui fournir le matériel dont elle avait besoin mais cela restait tristement insuiffisant. Tellement insuffisant ! Neela faisait de son mieux et il est des fois où ses quelques connaissances médicales lui permettaient de soigner et même parfois de sauver quelques uns de ses frères et soeurs créatures. Mais quand, lorsque comme ce soir, ses efforts se révélaient être vains... La jeune femme se sentait plongée dans une telle colère, dans un tel désespoir qu'elle se sentait proche de la démence.

Il y avait tant de blessés, tant de morts dont les visages continuaient à la hanter des mois entiers après leur décès ! Il n'y avait pas une nuit où la jeune femme ne se réveillait en pleurs et en sueur, perturbée par ses visions cuachemardesques où elle se voyait toujours finir emportée par un tourbillon de sang. Cela ne pouvait plus durer ! Elle ne le supporterait plus longtemps. Depuis des semaines, Neela ne dormait quasiment plus, oubliait fréquemment de se nourrir et son humeur était devenue sombre et morose. Elle n'était plus que l'ombre d'elle même et même elle avait parfois du mal à se reconnaître lorsqu'elle apercevait son reflet dans le miroir.

Perdue dans ses pensées, c'est à peine si elle entendit les bruits de pas qui avançaient vers elle. Quelqu'un approchait, sans nuls doutes intrigué par tout le brouhaha qu'elle avait causé. Bien trop fatiguée pour se lever et aller voir de qui il s'agissait, Neela resta là. Debout, moulée dans cette combinaison de cuir noire , toute éclaboussée de sang et le regard perdu dans le vide, elle avait l'air perdue. Les pas s'étaient arrêtés et Neela sentit une présence amicale près d'elle. Elle leva enfin la tête vers le visage de son visiteur et parvint à esquisser un faible sourire.

[Zoro est arivéééééééhéhé!!]

Dans le coul... Oui bon, le dit couloir traînait l'odeur pestinencielle des égouts, donc non, ce n'était pas vraiment un couloir, mais passons. L'odeur était décidément bien pénible pour les sens olfactif de la Peste de service, mais elle s'efforçait de l'ignorer, les pensées dans le vague, tandis qu'à son indexe tournoyait frénétiquement le petit cercle de métal d'un trousseau de clé... Inconnu, du moins pour tout autre personne qu'elle. La direction que prenait ses pas n'était pas difficile à saisir, il s'agissait simplement de l'infirmerie de fortune. Non, elle n'était pas blessée, et de toute manière même si elle l'avait été, il aurait fallu qu'elle soit à l'article de la mort pour se laisser traîner là-bas en vue de soins. Un manque de confiance envers le docteur attitré de la Thianra? Plutôt une légère phobie irrationnel de tout ce qui est censé soigné. (Surtout une peur panique des désinfectants qui piquent en fait, mais chut!)

Mais au bout d'un moment, elle se figea. Elle aurait juré avoir entendu un bruit de verre brisé. Puis un gros "BOUM" s'en suivit, faisant sursauter la pauvre minette qui, n'entendant pas de cri d'aide, préféra simplement rester dans le couloir le temps que la tempête se calme. Il fallu compter un certain temps pour que Lior se décide finalement à se remettre en route, hésitante peut-être. Il fallait dire que dans le cas d'une bataille, elle ne tenait pas à se prendre un quelconque objet dans la figure en franchissant la porte mais... Bon, c'était pas une dégonflée quand même. Prenant une large inspiration, qui manqua d'ailleurs de lui déclencher une crise de toux avec l'odeur ignoble, elle glissa les clés dans sa poche et osa pousser finalement la porte.

Un pas, le regard de Lior tomba immédiatement sur le lit de fortune où deux silhouettes étaient reconnaissables sous un drap. Ah, voilà la justification du boucan précédent. L'air habituellement espiègle de la Peste disparu immédiatement avant de se reporter sur le médecin en cuir tâché de sang. Un échec, comme tant d'autres pour toutes les créatures de ce fichu monde. Lior n'était pas douée pour consoler, pas beaucoup non plus pour compatir. Les victimes, elle ne les connaissaient pas, et elle avait appris à ignorer ce genre de peine pour des inconnus. Mais elle s'approcha pourtant, distinguant les larmes sur le visage de Neela. Elle avait l'air perdue. Combien de temps avait-elle perdu à s'acharner contre la mort? Trop de toute évidence. Un peu mal à l'aise, Lior détourna un instant les yeux, le temps de se décider sur quel plan elle se devait de réagir quand le visage de Neela se releva.

Pour toute réponse, elle ne pu que lui rendre son sourire, pas du tout convaincant, mais bon, elle faisait de son mieux. Nerveuse, elle se passa la langue sur les lèvres, le temps de dire la seule chose qui lui semblait évidente, mais qui hélas ne serait pas d'un grand réconfort.

"Tu n'y es pour rien... Et puis, ils doivent être bien mieux maintenant, non?"

Mouais, assez simpliste, mais dans la mort au moins, les créatures n'auraient plus à craindre chaque seconde la souffrance ou pire encore. En tout cas c'était ce qu'espérait Lior.

La colère... La rage... Le désespoir... Tous ces sentiments si violents et qui venaient l'assaillir en même temps, ébranlant soudainement toutes ces convictions. Tout ce en quoi elle avait toujours cru... Tout ce pourquoi elle se battait depuis tellement de mois... Tout cela sembalit ce soir réduit à néant. Comme si ses espoirs étaient morts en même temps que ses deux patients. A présent Neela se sentait incroyablement vide... Un corps dénué d'âme et de coeur qui ne continuait à se mouvoir que par pur réflexe... Une ombre... Neela n'était plus qu'une ombre...

Comme prisonnière d'u cauchemard, c'est à peine si elle entendit les mots de son amie lui parvenir. Ces mots qui eussent pu paraitre si maladroits et froids mais qui relevaient d'une bien aimable envie d'aider. Lior... L'adorable pickpocket du groupe, celle qui savait toujours vous trouver ce dont vous pourriez avoir besoin. Cette crétuare à peine sortie de l'enfance et qui avait si bien su préserver sa capacité à se montrer facétieuse, insouciante et parfois même inconsciente. Lior... qui se tenait à présent devant elle et qui tentait de la réconforter de son mieux. Lior, qui par sa seule présence, semblait apaiser son désespoir.

Plogeant son regard doré dans celui de cette si mignonne créature, Neela ne put retenir un léger sourire. Elle lui était reconnaissante d'être ainsi venue la trouver et d'avoir ainsi mit fin à sa solitude. Neela s'approcha doucement de la jeune fille et souriant franchement cette fois elle lui ébouriffa doucement les cheveux et dit :

- " Tu dois avoir raison petite chatte... De toutes façons, quelque soit le Destin que la Mort leur réserve cela sera toujours préférable à une vie égrennée de fuites et de dangers, non ? L'enfer c'est içi et maintenant... La Mort est une délivrance je suppose. " dit elle d'un air désabusé.

Puis, s'éloignant quelque peu, elle alla s'adosser au mur et, sortant de sa poche un paquet de cigarettes, elle en alluma une. Tenant délicatement cette dernière entre ses longs doigts elle la porta à sa bouche et prit une longue bouffée. La fumée s'éleva dans les airs, virevoletant en d'étranges volutes bleutées. Laissant un instant son regard posé sur ces nuages éphémères , Neela semblait toujours aussi absente. Puis, comme cédant à nouveau à un coup de sang, elle donna un violent coup de pied dans les débris de fioles qui jonchaient le sol.

- " De toutes façons que veux tu que je fasse avec si peu de moyens ! C'est à peine si j'ai de quoi panser une plaie... Quant au métériel chirurgical je ne t'en parle même pas ! Celui ci est si ... vétuste que même si j'arrive à sauver quelqu'un celui ci risque de mourir d'une septisémie... ! Si jje m'écoutais je sortirais et je ferais un réel carnage ! Je les tuerais tous ces enfoirés d'Arnaiths ! Et encore se serait encore trop doux pour eux ! "gronda t'elle d'ue voix sourde.

La colère, l'emportement n'étaient guère dans les habitudes de la jeune puma mais depuis quelques temps elle était devenue sombre et rares étaient ceux qui osaient encore l'approcher de peur de déclencher l'une de ses crises de colère et de violence. Elle si effacée et presque timide était devenue arrogante et froide. Plus les jours passaient et plus la compassion semblait s'étioler chez elle. Elle tentait d'accomplir au mieux la tâche qui était la sienne mais déjà elle n'était plus la même. Son coeur devenait sec et aride et peu à peu les patients ne représentaient plus pour elle qu'un amas de chairs à vif qu'il lui fallait tenter de rafistoler. Elle évitait même de regarder leurs visages et leurs yeux de peur que ceux ci ne viennent à leur tout la hanter dans les rares moments où elle parvenait encore à fermer l'oeil.

Sa cigarette finie, elle la jeta négligemment au sol. Celle ci entra en contact avec une flaque d'alcool qui ornait le sol et soudainement, une flamme naquit. Loin d'en être perturbée, Neela ne bougea pas d'un pouce. La flamme oscillant entre les tons rouges et orangés dansait devant ses yeux mais elle restait toujours impassible. Le feu... un ennemi pour les créatures comme elle. Et pourtant, à ce moment précis, Neela se surprit à souhaiter que cette petite flamme enfle jusqu'à devenir un ardent brasier qui dévorerait tout sur son passage et qui ne laisserait derrière lui que cendres et poussières. Le feu purificateur...

- " A quoi sert il encore de se battre ? Avec le temps j'en ai même oublié ce pour quoi nous nous battions. Je suivrais Noah et Algol les yeux fermés et quoiqu'ils exigent de moi je le ferai sans jamais poser de questions. Ils m'ont offert un refuge, une occupation, une famille... Mais il est des fois où je ne sais plus à quoi rime tout cela ... Lior... Je me sens si perdue içi... Suis je vraiment à ma place ? "

Puis, comme prise d'un sursaut de lucidité, elle attrappa l'un des draps qui se trouvait là et le jeta sur la petite flamme dansante, l'étouffant. Après être venue piétiner le drap de façon à s'assurer que le feu était bien éteint, elle se tourna et observa son amie.

- " Dis moi habile petite voleuse... Toi qui semble toujours savoir où tout trouver... Pourrais tu m'indiquer où je puis trouver des médicaments ainsi que du matériel... Rassures toi : je ne t'embarquerais pas avec moi dans une folle aventure mais... Disons que je me sens d'humeur à agir et je ne serai pas contre un petit peu d'exercice... En fait j'irais bien délester quelques humains de ces objets et produits qu'ils ont à proffusion et qui me font tant défaut ! Qu'en penses tu ? " dit elle les yeux emplis de malice.

Subitement, la jeune femme s'était redressée et semblait secouée par une étrange fébrilité. Une idée aussi saugrenue que dangereuse était en train de germer dans son esprit . Une idée à laquelle elle n'était, pourtant, pas prête à renoncer ! Lorsqu'elle regarda à nouveau, un sourire carnassier et cruel illuminait son visage pâle et ses yeux brillaient d'une sombre folie.

[oO°... *S'échauffe les mimines*]

Inconsciemment, Lior enfonça sa tête dans ses épaule et ferma les yeux, comme si elle aurait craint de se prendre un coup. Ce n'était finalement pas pour cette raison qu'elle avait une pareille réaction, plutôt un réflexe naturel qui finalement n'avait disparu qu'avec une seule personne. Neela aurait été un humain que la gamine aurait très certainement eu une gestuelle nettement moins passive. Pourtant elle s'empressa de rouvrir les yeux, coupable de son attitude si peu confiante, mais en même temps quand on voyait l'aspect de la pièce, comment être certain d'une sympathie pleine et sincère? Pourtant ce n'était pas la méfiance qui ombrageait le regard or de la chatte, mais plutôt une sorte de... Déception? Quelque chose comme ça du moins. Une déception de constater que la vie s'acharne à ébranler même les créatures les plus combattives. Combien d'autres avaient dû mourir entre ses mains depuis que dame puma avait rejoint les rangs de la Thianra? Trop de toute manière. Qu'aurait-elle pu faire contre sa peine et sa douleur?

Impuissante, elle se contenta de baisser les yeux. Elle qui était venue dans l'optique d'annoncer une bonne nouvelle sentait son arrivée mal venue. Tuer les Arnaiths? Un bien noble but. Celui qu'une petite demoiselle encore un tantinet protégée par l'innocence partageait, paradoxalement. Le genre de but qui finirait par détruire l'insouciance qu'elle avait jusque-là réussi à préserver. Mais n'était-elle pas prête à se damner quoiqu'il en coûte pour atteindre son but? Ce fut tout juste si elle sursauta quand la flamme s'éleva, seule dans l'idée peut-être saugrenue de mettre le feu à l'infirmerie de fortune. Pourtant Lior ne réagit pas, toujours impuissante, toujours bien incapable d'imposer au médecin une autre manière de penser ou d'agir. Elle n'était pas sur son terrain, pas dans sa peine, elle n'était qu'un témoin dont l'influence était toujours limitée. Mais peut-être tout ceci pourrait changer?

Citation :: Je me sens si perdue içi... Suis-je vraiment à ma place ? "

"Plus que jamais!"

La tête encore enfantine s'était brusquement relevée, laissée à nouveau à ces paroles et émotions tellement plus rapides que ses pensées. Qui d'autre que Neela pourrait les soigner? Qui d'autre pourrait mieux qu'elle retenir la vie entre ses mains? Lior n'envisageait pas de confier ses blessures à qui que ce soit d'autre au sein de la Thianra. Pas à quelqu'un qui, à l'inverse de Neela, serait froid et détaché face à la mort devenue pourtant une habitude trop présente entre les murs du Refuge. Enfin les mots du médecin prenaient un sens qui firent tressaillir les oreilles presque toujours curieusement baissées de la petite féline. Trouver des médicaments, oui mais... Elle détourna à nouveau les yeux, incertaine. Les accès d'émotions pouvaient faire tourner un cambriolage au désastre, elle était bien placée pour le savoir et pourtant...

Elle glissa une main dans la poche de son jeans trop large, un léger cliquetis métallique fut la première chose qui pu faire deviner ce dont il s'agissait. Avec un geste d'hésitation, elle sorti un trousseau de clé de la dite poche, le leva à la hauteur de ses yeux qui eux étaient revenus se poser sur Neela. Incertaine, elle se passa une langue sur les lèvres, mesurant cette fois-ci chacun des mots qu'elle allait prononcer.

"J'ai... Suivit un pharmacien à la fermeture de son officine."

Oui, évidemment, ça résumait très clairement... Elle devrait songer à se faire poser un traducteur pour que le commun des mortels puisse la comprendre.

"Je lui ai piqué ça. Il ne s'en rendra pas compte avant plusieurs heures alors... Oh, il n'y aura malheureusement pas de gros matériel médical, mais au moins trouverons-nous peut-être de quoi renflouer les armoires de cette infirmerie, non?"

Si elle avait su, elle aurait plutôt suivit un chirurgien à la sortie de l'hôpital, le butin aurait été plus conséquent, ou très certainement plus hors de prix qu'une série d'antibiotiques, de stupéfiants, de pansements et autres divers objets à diverses utilités.

"Si tu veux tenter d'équilibrer la balance, c'est le moment. Mais je viens, il y aura sur place d'autres systèmes de sécurité. On n'enferme pas des médicaments avec une simple clé."

Son regard hésitant avait disparu pour ne laisser place qu'à celui inébranlable et décidé qui donnait l'impression de ne pouvoir être brisé. Elle comptait bien y aller, coûte que coûte, et de toute manière elle seule savait quelle pharmacie était accessibles avec les clés en questions qui maintenant se balançaient sensiblement au bout de son index.

Malheureusement (ou heureusement) pour les deux félines, la dernière réplique de Lior ne tomba pas dans l'oreille d'un sourd.

Pour comprendre ce qu'Algol faisait près de l'infirmerie et pourquoi il s'en était approché si discrètement, il fallait retourner près de deux ans en arrière, lorsque le sous-chef avait pour la première fois croisé le fer avec Catelyn Jadenoire. Le combat, féroce et cruel, avait failli se conclure par la mort des deux adversaires, mort qui n'avait été évitée que parce que l'Arnaith avait eu assez de forces pour se traîner jusqu'à l'hôpital le plus proche et y exiger qu'on les soigne tous les deux. Quel cynisme d'appliquer le verbe "soigner" à ce qu'ils lui avaient fait... Certes, ils avaient refermé ses plaies, mais à aucun moment ce n'était dans le but de le voir guérir; tout ce que cette ordure de véto (docteur Shift, Mengele pour les intimes) avait en tête, c'était d'empêcher le précieux prisonnier de détaler avant que sa patronne n'aie repris connaissance. Algol avait donc passé quatre jours attaché sur un lit, avec assez de neuroleptiques et d'anxiolitiques dans les veines pour le réduire à l'état de légume.

Il ne s'était remis que de l'excès de neuroleptiques.

Lorsqu'il était enfin sorti de ce cauchemar, le fier léopard des neiges était tout simplement devenu un junkie. Pendant des mois, il avait lutté pour se sevrer, sans rien oser en dire à personne. Petit à petit, les calmants lui avaient paru moins indispensables, et il avait fini par ne plus y toucher. Mais lorsqu'il lui arrivait l'une de ces tuiles dont sa vie semblait avoir le secret, il ne pouvait s'empêcher de penser à l'infirmerie, à son armoire à pharmacie qui souvent cachait de petites boîtes de Lexomil, parfois même un peu de Valium...

L'attentat de l'école primaire était une tuiles. Algol ne voulait pas croire que Noah ait pu sacrifier des enfants sur l'autel de son triomphe - sans compter que le tigre était déjà trop impatient pour chercher comment mettre son portable sur silencieux, alors de là à fabriquer une bombe... Et pourtant, le léopard doutait. Depuis des jours, des semaines à présent, il craignait que son ami ait dépassé les bornes, et en même temps il s'en voulait de ne pas faire confiance à Noah. Un dilemme qui, lentement mais sûrement, le rongeait comme de l'acide. Et puis, ne parlons pas des conditions de vie dans ces égoûts mal aménagés, ni des victimes des Arnaiths qui continuaient à répandre leur sang sur les pavés de la cité.

Aussi, lorsqu'Algol avait entendu qu'on venait d'emmener à l'infirmerie une jeune femelle blessée et son petit agonisant, il avait décidé d'aller les voir. Et, même s'il ne se l'avouait pas à lui-même, d'essayer de grapiller quelques comprimés.

Ce fut ainsi que deux pulsions dangereuses (un cambriolage mal préparé et la rechute d'un drogué) finirent par plus ou moins s'annuler: le sous-chef s'encadra dans la porte au moment où la créature chat brandissait le trousseau de clé chapardé.

"Pourrais-je savoir ce que vous manigancez, mesdemoiselles?"

Autant pour le drogué: la créature qui se tenait à présent dans l'entrée de la petite infirmerie, bras croisés et sourcils froncés, était redevenu le sous-chef soucieux de la sécurité de ses subordonnés - et, Dieu merci, cette préoccupation avait totalement remplacé son envie de fouiller l'armoire à pharmacie. Le léopard des neiges laissa son regard peser sur les deux félines, avec cette expression que Laïna détestait, cette manière unique qu'il avait de dire avec ses yeux "qu'est-ce que vous faites qui pourrait me décevoir?". Que Lior, la cadette, se lance dans une opération un peu audacieuse, cela ne l'étonnait guère - il n'avait jamais vraiment parlé avec la jeune féline, mais il la connaissait assez pour savoir que question tête brûlée, elle rivalisait avec Laïna. Mais que Neela cherche les ennuis, c'était alarmant: selon Algol, elle faisait partie de ces gens extrêmement intelligents qui s'avéraient pourtant capables des pires idioties pour peu que leurs émotions prennent le dessus. Manque de bol, Neela avait également assez d'autorité pour qu'on n'ose pas lui faire remarquer qu'elle allait droit dans le mur. Cocktail explosif.

C'est seulement à cet instant qu'Algol remarqua le désordre et les corps drapés sur les lits. Son expression s'adoucit de manière quasi immédiate, tandis qu'un soupir de lassitude passait ses lèvres: encore deux de perdu. Il secoua lentement la tête, avec le fatalisme de celui qui en a soupé de la guerre, avant de ramener un regard beaucoup plus indulgent vers les deux femelles. Un regard qui appelait à la sincérité.

"Qu'est-ce qui se passe, Neela?"

Des images assailent son esprit... Sous ce drap blanc elle à soudainement l'impression de voir se poser sur elle le regard de ces deux créatures, de cette mère et de cet enfant qu'ellle a une fois de plus abandonné dans les bras de la Mort. Elle imagine leurs prunelles dorées, si semblables aux siennes, et qui viennent l'interpeller. Leurs yeux sont ternes et si froids... Ils semblent l'appeller et lui demander pourquoi... pourquoi n'a t'elle rien fait pour les sauver... pourquoi les a t'elle abandonnés ? Peu à peu les murs de l'infirmerie s'effacent, ils disparaissent pour laisser place au néan. Tout devient noir, la voix de Lior se fait lointaine, tellement lointaine... Tout est subitement noir et si froid ! Tellement glacial... Et ils sont tous là. Elle les voit tous, tous ces fantômes des créatures qu'elle n'a pu sauver, tous ceux là même chez qui elle n'a pu raviver la dernière étincelle de vie, toux ces êtres qui à présent viennent lui demander des comptes.Ils hurlent et leurs cris résonnent dans sa tête déchirant son âme et fendillant son coeur. Elle sent leur souffrance, leur peine, leur colère d'avoir été si brutalement arrachés à la vie. Elle voudrait fuir, sortir de ce cauchemard éveillé mais ils l'encerclent et l'entourent apparemment prêts à l'entraîner avec eux dans les abymes glacées de la Mort. Neela ne bouge pas. Elle n'a pas peur. Elle n'a plus peur. Elle voudrait les suivre.

Le cliquetis métallique de clés qui s'entrechoquent. La voix de Lior qui lui parvient de nouveau claire et compréhensible. Le puma se secoue et ouvre les yeux. Elle et toujours à l'infirmerie et Lior se tient devant elle, un trousseau suspendu au bout de son index. Les clés ? Quelles clés ? Ah oui... Elle se souvient : l'officine. Ses yeux s'illuminent alors qu'elle commence peu à peu à reprendre espoir. Elle n'ignore pas qu'une telle entreprise se révélerait sans le moindre doute des plus dangereuses mais elle s'en contrefiche royalement. La journée avait été trop dure et la désillusion trop grande. A bout de forces, épuisée et quelque peu désespérée, Neela était prête à tout et même aux pires idioties pour tenter de faire basculer la balance en faveur de la vie pour une fois. Et puis, délester un humain et même en découdre avec quelques autres ne l'embêtaient guère... A vrai dire peut être même était ce ce qu'elle recherchait. Et si l'adversaire était plus nombreux ou plus fort ... Tant pis...

Cependant elle ne voulait pas entrainer la petite pickpocket dans une telle épopée suicidaire. La jeune femme médecin en avait peut être marre de son existence et elle était sans nuls doutes de courir à sa perte mais elle n'entrainerait personne avec elle ! Hors de question ! Surtout pas quelqu'un qu'elle aimait sincèrement... Elle avait le regard rivé sur ces clés qui se balançaient doucement en l'air lorsque des pas lui parvinrent du couloir. Légers et aériens. Puis cette voix qui s'élevait dans les airs. Voix aux inflexions familières et qui ne laissait aucun doutes possibles sur son propriétaire. Des mots éloquents s'il en est et qui vont droit au but. Cette voix qui ne laisse pas d'autre choix que de se montrer franc et de se soumettre. Avant même que ne se profile dans l'encadrement la silhouette du léopard des neiges, Neela sait qu'il s'agit d'Algol.

Se détachant du mur sur lequel elle était adossée depuis un moment, elle s'avance tête baissée près de l'endroit où se trouvent ses deux compagnons d'armes. Vive comme l'éclair sa main fine et grâcile s'élève dans les airs et se saisit du trousseau de clés et l'enfourne dans sa poche. Puis, de l'autre main elle sort un flacon de pilulles, le seul qui ait réchappé à tout son saccage et l'ouvrant avale deux cachets de Valium. Puis, ouvrant les yeux, elle croise le regard du bras droit de Noah, l'inssaisissable Algol. Ces yeux si expressifs que plus d'une fois il lui était arrivé de se demander pourquoi le jeune homme s'évertuait à mettre des mots sur des pensées que son regard exprimait très bien tout seul ! Elle observe, attentive et silencieuse, le regard du léopard se poser sur Lior et elle puis sur les cadavres recouverts. Elle entend cette voix , soudainement plus douce qui s'adresse à elle et qui lui demande ce qui se trame içi.

Algol. Mentir à un tel être aurait été non seulement stupide mais bien inutile, ce dernier possédant une faculté rare à déceler le mensonge partout où il se terrait. De plus, Neela respectait trop son intelligence pour s'aventurer sur la piste aventureuse et dngereuse de la cachotterie. Aussi décida t'elle de jouer carte sur table avec cet homme qu'elle respectait sans pour autant le craindre malgré ses accès de violence quasi légendaires maintenant. Attirant Lior légèrement en retrait elle sourit doucement à la petite féline et après lui avoir dit :

- " Tu n'y es pour rien Lior... Merci d'avoir voulu m'aider en tous cas... D'ailleurs j'aurais encore quelques petits détails à te demander concernant le chemin à prendre pour me rendre jusqu'à l'officine...dit elle d'un ton confiant et en lui adressant un clin d'oeil complice. Puis elle se tourna vers ALgol elle lui jeta innocemment le flacon encore bien empli de pillules. Enfin, sortant une nouvelle cigarette elle en tira une bouffée et lui dit, sans la moindre défiance, d'un ton neutre où perçait une certaine pointe de douceur : Gardes donc ce Valium pour moi... Si je les conserve je risque fort de toutes les avaler et jene pense pas que tu souhaiterais voir le médecin de la Thianra devenir une junkie, n'est ce pas ? "

Puis elle tira à nouveau sur ca cigarette, inspirant longuement la fumée, et la recrachant doucement. Elle jeta à son tour un regard vers l'endroit où reposaient les deux corps, perdus au milieu de tous ces débris de verre cassé et de meubles brisés. D'un grand geste de la main, elle montra l'importance des déga^ts puis reprit, la voix tremblante. Etait ce de colère ou de tristesse bien malin qui aurait pu le dire !

- " Ce qu'il se passe ? Constates donc par toi même Algol ! Ils sont morts ! Une fois de plus je n'ai rien pu faire pour leur accorder la moindre chance de survie ! Une fois de plus je n'ai pu qu'atténuer leurs douleurs pour leur offrir une mort un tant soit peu décente... Ne suis je donc là que pour cela : euthanasier les nôtres ? "

a nouveau elle sentait cette rage sourde l'envahir et la tenailler. Luttant pour ne pas laisser celel ci éclater devant le léopard des neiges, Neela se contenta de shooter dans les débris reposant à terre. Puis, allant rejoindre le coin de la pièce opposé à celui où se trouvaient les deux autres, elle leur tourna le dos un instant, juste le temps d'écraser une larme qui commençait à perler.

- " Je ne vous reproche rien ni à Noah ni à toi... Je sais trop bien ce que je vous dois, ce que nous vous devons tous. J'étais perdue lorsque tu m'as trouvée et amenée içi. Grâce à toi j'ai trouvé une famille, une maison et je suis fière de mettre mes connaissances à votre service. Mais regardes ! Regardes donc ! Comment puis je soigner sans matériel ni médicaments ? Comment, dis le moi ! Pour une personne que je peux sauver combien d'autres en vois je mourir ? Dix ? Quinze ? Peu importe... Même une seule ce serait déjà trop ! Cela ne peut durer ! Je ne le permettrais pas ! " dit elle calmement, presque trop calmement. Comme ce même calme qui annonce si bien une tempête à venir.

Mais il y avait bien longtemps que la jeune femme avait appris à maîtriser ses émotions et peu importe la haine et la colère qu'ils pouvaient sentir chez elle en ce moment là ce n'était rien comparé à ce qu'elle éprouvait réélement. Rien du tout... Les yeux rivés sur ceux d'Algol elle reprit, d'une toute petite voix, comem si son esprit s'éloignait à nouveau aspiré par un tourbillon d'idées plus noires les unes que les autres.

-" Pourquoi ces humains, qui prennent un si malin plaisir à nous traquer et à nous mettre à mort, garderaient ils pour eux seuls ce matériel qui à moi me fait tant défaut ? Lior était juste venue me réconforter et c'est moi qui lui ai demandé de m'aider à trouver une solution à mon problème... Elle n'a fait que m'aider. Et je lui en suis reconnaissante. J'utiliserai ces clés et j'irais, seule, "visiter" cette officine... Ma décision est prise Algol et je doute fort que tu parviennes à m'en dissuader... D'ailleurs... n'est ce pas l'intérêt de chacun d'entre nous d'avoir du matériel flambant neuf ? "dit elle d'une voix pourtant mal assurée.

Neela avait reporté son attention sur Lior, ne pouvant plus soutenir le regard de son supérieur. Elle ne le craignait pas mais craignait plus que tout de le décevoir. Elle ne connaissait que peu cet être énigmatique qu'était Algol mais elle appréciait le peu qu'il laissait percevoir de lui et elle lui était si redevable... Lire de la déception dans ses yeux aurait été trop dure.

Toute accaparée par la réponse que Neela pourrait lui donner, et son air déterminé plus que jamais présent, même si our beaucoup cette même expression n'était que le reflet d'une simple gamine têtue sans réel sens des réalités, elle attendait. Peu importe le casse, elle ens erait. Lior n'était pas de ceux qui préféraient voir les autres prendre des risques. Elle n'était pas de ceux non plus qui craignaient les retombées de ce genre d'acte. En revanche elle était de ceux qui adoraient goûter aux joies d'une poussée d'adrénaline. Et qui sait, sur place trouverait-elle aussi son compte pour ses bricolages. Il devait très certainement y avoir des ordinateurs, des machines diverses dont elle pourrait récupérer les pièces pour ses propres amusements. Rien n'était jamais perdu pour quelqu'un comme elle. D'ailleurs toute attentive qu'elle était vis-à-vis de Neela, elle négligea totalement le reste du monde et fit un sursaut magistral en entendant les premières paroles d'Algol. Cette voix, elle la reconnaissait sans peine, l'assimilant parfois à celle d'un paternel rébarbatif. Se retournant, elle croisa immédiatement les mains dans son dos,comme un mioche pris en flagrant délit de bêtise. Elle n'avait plus besoin de dissimuler les clé déjà prises par le médecin. Pourtant il n'y eut aucune remontrances, juste la réalisation que Neela n'allait pas bien.

Ecartée de l'échange malgré elle, Lior fronça les sourcils, l'air visiblement courroucée. Malgré le sourire de Neela, elle détestait qu'on cherche à la protéger de quoi que ce soit. Mais plus que tout, les paroles du médecin manqua de la rendre furieuse. Elle ne cacha en rien ce sentiment, croisant les bras, tapotant du pieds. Pensait-elle vraiment qu'elle se contenterait de lui donner l'adresse? Et pourquoi ne lui préparerait-elle pas un pic-nic tant qu'à faire? Elle ne répondit pas au clin d'oeil complice, et se contenta de détourner la tête avec un léger souffle si fréquent chez les chatons mécontents. Elle n'imterrompa pas Neela, loin d'elle cette idée. En revanche il était hors de question qu'elle reste silencieuse face aux derniers propos tenus.

"Et puis quoi encore? Ne compte pas y aller seule, ça n'a rien de similaire avec du shopping. Tu auras besoin de moi, et il nous faudra aussi d'autres créatures pour emporter un maximum de matériel."

Défiante, sans aucun doute, Lior décroisa les bras pour poser les mains sur les hanches, sans la moindre crainte. Elle était trop souvent considérée comme une enfant, c'était ce qui avait perdu les derniers humains qui s'étaient servis d'elle. Et la Thianra? Commettraient-ils les mêmes négligences que ces stupides délinquants?

"Mais ce ne sera que temporaire, on ne peut pas se contenter de ça. Algol..."

Se détournant de Neela, elle planta ses yeux d'or dans ceux du second. Non, elle ne le craignait pas, elle ne voulait juste pas se faire réprimée ou rabaissée. Elle ne voulait pas non plus se contenter de suivre sans proposer au moins des solutions un peu plus utiles que de simples petits casses.

"... Neela a besoin de matériel médical plus poussé, des objets qu'on ne trouve pas dans une simple pharmacie. Le genre de matériel qu'on ne trouve que dans un hôpital."

Quelle bonne idée, n'est-ce pas? Stupide idée aussi. Pourtant Lior avait une expression tellement sérieuse qu'aucun doute n'était possible sur ses idées. Commettre un vol dans un hôpital? Pourquoi pas après tout! Mais Lior pensait plutôt aux fournisseurs des hôpitaux. Le genre de braquage qu'il lui faudrait préparer minutieusement, ce qu'elle ne pourrait pas faire si personne n'approuve.

[pardon, j'ai eu du mal à faire le deuil de ma précédente tentative de réponse >.> ]

Gentil léopard, pauvre gentil léopard, qui ne pouvait assister à un tel spectacle sans que le désarroi de Neela ne devienne un peu le sien. Plus elle parlait, et plus il sentait la douleur, l'effroyable souffrance que le médecin ne jugulait que par un effort de volonté qui forçait le respect. Algol n'était pas surpris, non - il ne pensait pas qu'un seul soignant digne de ce nom aurait pu mener toute une carrière sans craquer de la sorte au moins une fois. Neela se sentait inutile. Elle ne l'était pas, grand Dieu non! Mais elle le croyait, et c'était bien triste.

"Neela..."

Déjà il cherchait les mots qui réconfortent, les phrases qui calment, lorsque la jeune femelle l'interrompit en sortant un tube orangé de sa poche. Depuis l'américanisation totale du système de santé français, les médicaments n'étaient plus conditionnés que dans des boîtes semblables. Celle-là pouvait abriter n'importe quelle substance. Mais les yeux hypersensibles d'Algol ne parvinrent que trop bien à lire la mention apposée sur l'étiquette, et voir Neela engloutir deux Valium d'un coup lui fit l'effet d'une gifle. Le médecin dut d'ailleurs remarquer son air effaré, et se méprendre sur son origine (ou alors vouloir le piéger d'une façon douloureuse et honteuse), car avant de faire passer les pilules d'une cigarette, elle prit soin de lui confier le tube de calmants.

Le garder pour elle.

Pitié... pitié non...

La nuque raidie, doigts crispés sur le récipient en plastique, il sembla à Algol que toute sa vie se jouait en cet instant, où il luttait avec désespoir pour ne pas baisser les yeux, ne pas lire ce nom toxique, ne...

Ca lui ferait du bien, tellement de bien. Il savait comme ses pensées s'éclaircissaient après ça, comme ses muscles se détendaient. Comme ses souvenirs reculaient, et ne lui paraissaient plus que d'inoffensifs tableaux d'un passé révolu. Comme il...

Arrête! Arrête ça tout de suite! Regarde-toi, tu es pâle, tu frissonnes. Neela te regarde, elle est médecin, si ce n'est pas déjà fait tu crois qu'elle mettra combien de temps à comprendre que ce n'est pas le médecin de la Thianra qui est un junkie, mais carrément le sous-chef?! Reprends-toi, reprends ton rôle. Maintenant!

"Je sais, je sais, ça ne peut plus continuer ainsi. Mais une rafle ne s'organise pas comme ça, et nous ne pouvons prendre le risque de vous perdre. Ni l'une, ni l'autre."

Il insista sur la dernière phrase, parce que Lior leur était tout aussi utile que Neela, mais que seulement la deuxième avait pour l'heure des pulsions suicidaires. Il dévisagea longuement les deux félines, cherchant dans leurs yeux ce qui les motivaient à ce point, ce qu'elles étaient prêtes à faire, ce qu'elles consentiraient à préserver. La puma était si douée. La petite était si jeune.

Plop. Algol avait serré trop fort, et le petit tube venait de s'ouvrir, répandant la moitié de son contenu sur le sol.

"On ne pars pas en chasse sur un coup de tête."

Le léopard des neiges s'accroupit pour ramasser les gélules et toutes les remettre dans le tube. Pourvu que ses doigts ne tremblent pas autant qu'il le lui paraissait.

Un tour du poignet, et le tube était rebouché. Une pilule de Valium était restée au creux de la paume d'Algol, entre des doigts rebelles qui la firent disparaitre dans une poche sans que la tête puisse rien y faire.

Juste au cas où.

Oh non, je t'en prie non...

Concentre-toi. La proposition de Lior. Du matériel hospitalier.

"Les humains en ont besoin, eux aussi..."

Songeur, parfaitement conscient qu'il venait de lâcher l'équivalent thianra d'un blasphème, Algol s'appliqua à traverser lentement l'infirmerie dévastée pour enfermer le Valium dans la dernière armoire à peu près intacte. S'il l'avait pu, il aurait jeté un coup d'oeil éloquent à Neela pour la dissuader de venir le reprendre, mais il eut trop peur que l'envie maladive que lui-même avait de ces pilules ne se lise dans ses yeux.

Alors Algol eut une idée, une idée qu'il aurait repoussée d'entrée de jeu si elle lui était venue dans des conditions normales. C'était insensé. Affreusement dangereux. Et pourtant...

Rien n'allait plus à la Thianra. Noah sombrait dans une folie meurtrière de plus en plus épaisse, Algol sentait sa motivation s'étioler un peu plus chaque jour, ils dormaient dans les cuves puantes d'une vieille station d'épuration, sans cesse les félins étaient plus indisciplinés, sans cesse il en tombait dans les griffes ennemies, et toujours, toujours plus de deuils, toujours moins d'espoir...

Le deux femelles avaient raison. Il fallait que ça s'arrête.

"Plutôt que de piller un hôpital civil déjà en manque de matériel, pourquoi ne pas aller nous servir à la source? Au lieu de voler ceux qui sont à peine mieux lotis que nous, faisons quelque chose d'utile."

Il se retourna pour faire face aux deux félines, et dans ses yeux aussi on pouvait à présent lire l'énergie débordante et stupide du désespoir. Cette idée aurait dû être celle de Noah. Mais Algol était sur le point de fondre en larmes tellement il avait la sensation que la drogue dans sa poche le brûlait, et il en avait assez d'être raisonnable.

"Prenons leur matériel médical aux Arnaiths M."

[Milles pardons pour cet honteux retard mais l'inspiration et la motivation m'ont un long moment fait défaut... Puissiez vous me pardonner ]

Un calme apparent sembla soudain se poser, telle une mince et translucide étoffe, sur ce minuscule et ridicule endroit que tous s'évertuaient encore à considérer comme une infirmerie. Les orbes dorées de la jeune puma se voilèrent eux aussi alors que la voix de son supérieur s'éleva dans les airs et prononça si doucement son prénom.

*Oh non Algol ! Je t'en supplie, ne m'appelle pas ainsi... Pas avec cette voix qui laisse trop bien transparaître ces émotions sur lesquelles même toi tu ne parviens pas à mettre de mots ! Ne me plains pas fier léopard des neiges ! J'ai besoin de te sentir fort et fier ! *

Le visage de la jeune femme s'abaissa un instant alors que tombaient au sol les dernières cendres de sa cigarette. Neela avait mal. Son esprit était torturé , secoué et sans cesse assailli par ces visages des morts qu'elle n'avait pu sauver et qui revenaient sans cesse la hanter. Elle était peut être médecin et créature, mais ces sentiments, toutes ces émotions qui agitaient et troublaient son coeur et son âme étaient si terriblements humains eux ! Les yeux étrangements perdus dans le vague pendant encore un long moment, c'est presque machinalement qu'elle écrasa du talon le mégot encore incandescent de la cigarette. Puis, relevant le visage et feignant d'afficher une mine assurée que cette lueur de tristesse luisant au fond de ses prunelles démentait si bien, la jeune femme s'approcha lentement de son supérieur et lui adressant un bien tendre sourire, elle posa délicatement un index sur les lèvres du mâle et se penchant à son oreille lui murmur simplement :

- " Ne dis rien... Je t'en prie Algol. N'oublies pas qui tu es : Noah n'étant plus tout à fait lui même ces derniers temps c'est à toi que reviens la lourde tâche de nous guider tous. tu ne dois, ni ne peux j'en suis désolée, te montrer faible ni même compatissant ! Algol... Si cher Algol... Toi à qui je dois tant, toi à qui je dois ma renaissance au sein de la Thianra... Tu dois être fort et inébranlable ! Alors ne dis rien... Je ne te mentirais pas : je souffre mais tu devrais me connaître suffisemment pour savoir qu'un seul mot, un seul ordre de toi et je redeviendrais ce bon petit "soldat" que je pense toujours avoir été jusque là... Aides moi Algol ! Guides moi ! Guides nous tous... "

Alors qu'elle s'éloignait lentement de lui, les yeux du jeune médecin étincellaient d'une petite flamme d'espoir et c'est presque souriante qu'elle abandonna son supérieur non sans lui avoir auparavant remis les cachets de Vallium. Bien qu'elle fit mine de ne rien remarquer, la fébrilité du mâle léopard devant ces simples cachets n'avait pas échappé à la jeune femme. Alors qu'elle se rapprochait de l'impétueuse et décidément bien téméraire petite Lior, le regard de la jeune femme glissa discrètement vers Algol alors que celui ci laissait bien maladroitement les pilules se répandre sur le sol. Un éclair de tristesse et d'inquiétude traversa ses yeux alors qu'elle ne pouvait repousser cette édifiante et pourtant réelle question : si la curiosité la poussait à ouvrir le tube, Neela trouverait elle exactement le même nombre de pilules que celui qu'elle savait s'y trouver quelques instants auparavant ? Les médicaments étaient des bien trop précieux pour que la jeune médecin n'en garde un listing très précis. Cette fois çi elle regretta presque d'être aussi bien organisée, comme si elle était sur le point de mettre à jour une vérité qu'elle aurait préféré ignorer.

Jouant avec ses cheveux comme à chaque fois qu'elle était nerveuse et tendue, mordillant légèrement sa lèvre inférieure, Neela alla se poster aux côtés de Lior et, après avoir patiemment et avec la plus grande des attentions, écouté les paroles étrangement prudentes du léopard, elle prit de nouveau la parole :

-" Pardonnes moi Algol, mais à t'entendre, j'ai la désagréable impression que tu nous prends, Lior et moi, pour de pauvres écervelées ou de pauvres folles désireuses de se jeter tête en avant dans la plus suicidaire des expéditions ! A moins que tu ne doutes de nos capacité à accomplir une telle mission ?" dit elle la voix légèrement éraillée par une once de colère.

Se retournant vers Lior qui demeurait jusqu'à lors bien muette dans tout ce débat, elle lui demanda d'un ton inhabituellement froid :

- " Je ne suis qu'une pauvre béotienne en matière de cambriolage, je l'avoue humblement, mais tel est bien ton domaine de prédilection, n'est ce pas ? De nous tous içi, tu es là seule qui puisse réellement nous donner un avis objectif et peut être même bien quelques conseils pour mener à bien notre expédition ! Lior... Aides nous ! donnes nous ton avis ! " demanda t'elle d'une voix qui se fêlait peu à peu.

Elle allait de nouveau questionner Lior sur ses projets, sur cet hopital qu'elle venait de mentionner lorsqu'elle s'arrêta net, stoppée dans son élan par la phrase malheureuse de son supérieur. Se tournant vers lui, le regard sombre et le visage fermé, elle lâcha d'une voix que la colère faisait trembler :

- " Pardon ? !!! Depuis quand devrions nous soucier du bien être des humains ? Depuis quand t'en soucies tu ? As tu oublié la façon dont ils nous ont toujours traités ? ; dit elle en se rapprochant quelque peu de lui. Ses yeux n'étaient plus que deux flammes qui dardaient presque avec violence le bras droit de Noah ; Comment peux tu seulement me demander de faire preuve de compassion ou de clémence envers ceux qui ont tué mon maître, ruiné ma vie, souillé mon corps et mon âme et qui ne semblent pas éprouver plus grand plaisir que de nous traquer et de nous mettre tous à mort ? Comment oses tu seulement prononcer de tels mots devant moi Algol ! " dit elle d'une voix basse mai terriblement plus cruelle que si elle s'était mise à hurler ces mêmes mots.

Neela était furieuse et terriblement déçue. Algol était certainement le mieux placé au sein de toute la Thianra pour savoir à quel point la jeune femme pouvait hair les humains. Il était celui qui l'avait recruté ! Il était celui, le seul, à qui elle se soit jamais confié ! Le seul à qui elle ait jamais avoué avoir été violée par des humains ! Et aujourd'hui il prétendait que ces derniers avaient droit à toute leur considération ? Trahison que cela !

Déjà la jeune femme s'éloignait, prête à quitter les lieux, lorsque les dernières paroles du mâle résonnèrent, terriblement plus douces à ses oreilles. Jetant par dessus son épaule un regard autant dubitatif que suspicieux à Algol, Neela le laissa finir d'exposer son idée. Le calme sembla alors la gagner et un petit sourire malicieux vint même flotter sur ses lèvres alors qu'elle allait s'adosser au mur en face de son supérieur. Allumant une énième cigarette, elle laissa ses yeux suivre un moment les arabesques des volutes bleutées de fumée puis inclinant légèrement la tête sur le côté, murmura comme on l'eut fait d'un secret :

- " Les Arnaiths M ? N'est ce aps toi qui, il y a juste quelques minutes, nous sermonaient quant à la folie de notre projet à Lior et moi même ? Tout cela pour nous en proposer un plus dément encore maintenant... "

Le visage affichant une assurance bien réelle cette fois et une détermination froide et toute nouvelle chez elle, la jeune femelle puma se rapprocha à nouveau du léopard des neiges et après avoir demandé d'un air rieur et complice à Lior :

- " Qu'en penses tu ? Un tel projet est il à la hauteur de tes ambitions ? En ce qui me concerne, je en râterais pas de m'associer à une telle "aventure" sois en certaine ! Après tout, c'est vrai : l'idée de pouvoir à la fois récupérer le matériel qui m'est indispensable et en même temps frapper en plein coeur nos plus terribles ennemis est bien trop séduisante pour que je n'y souscrive ou n'y succombe immédiatement ! Lior, je parie que tu en es aussi n'est ce pas ? "

Puis Neela adressa un radieux sourire à Algol et lui murmura du bout des lèvres, si faiblement que cela en était presque inaudible :

- " Ravie de te retrouver Algol ! Là je retrouve le meneur, le chef qui m'avait donné envie de m'enrôler parmi vous. Avec toi, pour toi, j'irais au bout du projet, même aussi fou celui ci puisse t'il être ! Parceque je te fais confiance à toi Algol ! A toi et à personne d'autre ! "

"Les humains en ont besoin eux aussi..." Cette phrase fit l'effet d'une gifle à Lior. Non seulement parce qu'elle la trouvait déplacée mais paradoyalement vraie. Sauf un léger détail qui échappait peut-être à Algol: les hôpitaux étaient suffisemment bien organisés entre eux pour qu'un manque de matériel soit vite comblé. Non, les humains ne risquaient rien, ou si peu... En comparaison des blessés de la Thianra qui mourraient jours après jour parce qu'eux n'avaient rien du tout... Et s'en prendre aux fabricants de médicaments avait été une solution vite écartée pour la simple et bonne raison qu'il faudrait coordonner plusieurs braquages pour avoir une assez grande variété de matériel quand un hôpital, lui, ne nécessitait qu'un seul délit, clair et ordonné, avec un regroupement qui permettrait qu mieux d'emporter tout ce qu'il faut, au pire de perdre un ou deux membres, et encore... Sans compter qu'il restait encore les distributeurs, qui eux regroupaient tout ce dont ils avaient besoin et qui, même en se faisant voler du matériel, ne compromettrait aucune vie humaine à par celle des gardiens sur place. Ce genre de scénario catastrophe était peu probable, les défenseurs des réserves d'hôpitaux comme de distributeurs étaient des gardes de sécurité, pas des soldats surentraînés. Sa vision semblait être la meilleure, et du haut de toute sa prétention de gamine mal lunée, Lior refusait de laisser qui que ce soit démonter ses arguments, surtout avec une sortie du genre "les humains en ont besoin, eux aussi..."

Lior n'était pas aussi fanatique que certains membres de la Thianra, elle tenait aux humains, du moins elle ne pensait pas que la race humaine pu être foncièrement mauvaise. Après tout chaque créature possédait son fond d'humanité, n'est-ce pas? Mais sur le coup, et vu l'importance d'améliorer les conditions de travail de Neela, Lior se fichait pas mal si cet act pouvait indirectement causer la mort de quelques humains qui eux avaient au moins l'opportunité et l'espoir de survie quand les créatures n'avaient que la mort pour issue. Elle ne fit que hocher la tête pour approuver les paroles de Neela. Le casse était sa spécialité, ça et le bricolage. Et rester sagement dans une pièce à réparer du matériel n'était pas vraiment une finalité pour Lior, surtout pas quand ses talents pouvaient être mieux exploités. Ce sentiment d'inutilité n'était pas le propre du médecon de la Thianra. Et piquer des portes-monnaies, et voler quelques maisons de banlieue, ne donnait pas à Lior l'impression de se considérer comme utile aux autres créatures. Lior resta étrangement indifférente cependant comparé à la réaction de Neela.

Mais pire encore, la proposition d'Algol fit rater un battement cardiaque à Lior. Attaquer les Arnaiths M? Pure folie. Son intérêt était piqué, bien sûr, ce serait le challenge le plus tentateur jamais proposé, mais c'était une prise de risque monumentale également. En solo, Lior se serait jeté sur l'occasion, mais évoquer le sujet à trois, ça faisait déjà deux vies risquées en plus. Combien de personnes faudrait-il compter? Combien de créatures étaient prêtes à se jeter dans l'action? Et surtout combien pourraient en revenir vivantes? C'était un peu comme si on disait à Lior de choisir le chemin pour traverser un champ de mine. Du suicide!! Surtout quand il y avait un sentier sécurisé juste à côté. Les lèvres de Lior tremblèrent un instant. Les deux félins devenaient-ils encore plus fous qu'elle? Elle seule devait avoir le monopole de l'inconscience apparente. Elle fronça les sourcils avec la réplique de Neela. Bien entendu que ce genre d'idée plaisait à Lior, mais devrait-elle être la seule à faire preuve de bon sens?

"C'est de la folie... Comment vous pouvez y penser? Surtout toi, Neela? Comment peux-tu envisager ce genre de prise de risque? Il n'y a pas eu assez de victimes?"

Là, c'était très mal placé comme phrase, et pourtant ça semblait si vrai à Lior. Combien de créatures se feraoent blesser? Quelles seraient les retombées? La Thianra n'était pas le seul groupe menacé. Avec ce genre d'actes, les Arnaiths pourraient en profiter pour justifier une persécution encore plus grande sur les créatures.

"Ce genre de cambriolage prendrait des mois à être préparé, et deux ou trois créatures n'y suffiront pas. Pour emporter assez de matériel il faudrait au moins être une dizaine à aller se jeter dans la gueule du loup, et je ne sais pas pour vous deux, mais moi je ne peux pas choisir comme ça d'envoyer mes semblables risquer leur vie, ou pire encore."

Le ton de Lior s'était sensiblement élevé, et elle prit une grande inspiration pour tâcher de se calmer.

"Ce n'est pas impossible à ràaliser, mais ça prendrait du temps, et ce temps, nous ne l'avons pas. Neela, tu as besoin de matériel au plus vite et en toute honnêteté, j'ai déjà de quoi braquer un hôpital, mais les Arnaiths M... C'est au-dessus de mes moyens pour le moment. Je n'ai pas la moindre idée de leurs systèmes de sécurités, j'ignore combien ils sont pour leurs tours de garde, à quel fréquence ils déplacent le matériel pour pallier à ce genre de vol, quel est leur armement précis... Ils ont nécessairement dû anticiper une quelconque attaque, et si on veut pouvoir être en mesure de passer leur défense, il nous faut déjà de base des choses que l'on a pas. Il nous faudrait les plans, les détails des entreprises de sécurité, les plannings des gradés, les itinéraires des déplacements, des véhicules pour transporter suffisemment de matériel pour que ce soit rentable, et surtout des créatures qui auront assez de sang-froid pour mener l'opération sans prendre de risque inutile. Et vouloir taper de l'Arnaith n'est pas en soi une preuve de sang-froid."

Et voilà que la Peste de service se mettait à faire la leçon. Non mais c'était le monde à l'envers ou bien?

» L'air libre...