Touchantes retrouvailles

L'après midi touchait presqu'à sa fin et Catelyn traînait Opale derrière elle. Une Opale joyeuse et légèrement fébrile. Les deux femmes avaient des paquets pleins les bras, résultat de la pause shopping de l'après midi. Catelyn arriva sur le seuil de sa maison, après avoir gravi quelques marches. Elle se tourna vers Opale et sourit.

- "Prête? Dés que tu seras entrée, je pense qu'il te sentiras. J'irais le chercher... ok?"

Elle tourna la clé dans la serrure et la porte s'ouvrit sur un vaste hall, splendide. Un grand escalier montait aux étages droit devant. Le salon était à la gauche, ainsi que la cuisine. Algol était dans la pièce à droite. Elle fit signe à opale d'aller s'installer dans le salon et se dirigea vers la pièce fermée à clé. Elle ouvrit la porte et chercha le félin du regard.

- "Algol? J'aimerais que tu viennes avec moi, j'ai quelqu'un à te montrer."

Elle alla élargir largement le champ de déplacement du félin et attendit patiemment qu'il daigne la suivre.

- "Si tu veux un conseil, ne fais pas ta mauvaise tête aujourd'hui et mets de l'ordre dans tes affaires. Enfin, moi je dis ça, je dis rien..."

Sur ces paroles mystérieuses, elle attendit.

Opale tournait le dos à la porte du salon. Ses cheveux avaient un peu poussé, ils lui arrivaient au milieu du dos maintenant. Son coeur battait si fort qu'elle avait l'impression qu'il allait bondir de sa poitrine. La jeune femme frottait nerveusement ses mains l'une contre l'autre si bien qu'elle s'en était fait rougir les paumes. Elle était silencieuse, pour ne pas avertir de sa presence. L'Adjointe ferma les yeux alors qu'elle entendait du bruit dans le couloir. Ils allaient bientot arriver. Il allait bientôt arriver...La porte se clancha alors.
La jeune femme fit demi tour, ses longs cheveux cendrés volant derrière elle. Sa main gauche tenait son avant bras droit pour cacher la disgracieuse cicatrice qui le barrait. Catelyn entra alors dans le salon suivie d'Algol. Un lourd silence tomba sur la pièce alors qu'elle le fixait.

Algol...Toujours vetu de son éternel costume crème. Opale ferma les yeux et les rouvrit quelques secondes après. Non, elle n'était pas dans un rêve, il se tenait bien devant elle. Elle n'allait donc pas se reveiller encore plus desemparée que la veille. Elle s'avanca alors pour ne plus être qu'à quelques pas seulement de lui. Une lueur d'une infinie tendresse brillait dans les yeux d'Opale. Un sourire aux lèvres, elle le detaillait. Il n'avait pas beaucoup changé. Un peu maigri et ses cheveux eux aussi avaient poussés. Les jambes de la jeune femme devinrent alors du coton et ses mains étaient agitées de legers tremblements. Huit mois...Huit longs et interminables mois qu'elle n'attendait qu'une chose: Le revoir. Et là, elle l'avait devant elle.
Après quelques minutes, Opale ouvrit enfin la bouche et brisa le silence.

"Bonjour, Algol..."

C'était une phrase simple de politesse mais la jeune femme revait de la prononcer depuis si longtemps. Elle ne reussit pas à se retenir plus longtemps et une larme coula sur son visage. Elle l'essuya du revers de la main. Durant tout le trajet elle s'était répetée: Ne pas pleurer Opale. Mais c'était trop dur et l'émotion trop grande. Toujours aussi tremblante, la jeune femme lui fit un sourire. Un beau et grand sourire. Le même qu'elle lui avait fait quand il était partit de chez elle, il y a presque un an maintenant.

Patiemment, Catelyn attendit qu'Algol se rhabille. Elle retint un sourire franchement amusé en voyant son air grognon. Il devait la prendre pour une enquiquineuse de première et la maudire de le réveiller ainsi. Elle imagina la tête qu'il ferait dans quelques minutes et un sourire fugitif éclaira son visage.

- "Ce que tu peux être grincheux quand tu t'y mets. j'espère que tu vas retrouver ton amabilité d'ici peu..."

Elle l'emmena derrière elle et pénétra dans le salon, s'effaçant pour lui laisser découvrir Opale. Une Opale saisie par l'émotion et qui prononça quelques mots banals, mais chargés d'émotions et de tendresse. Catelyn se positionna aux côtés d'Algol et lui souffla à l'oreille :

- "Surprise!"

Elle lui fit un petit sourire, avant de faire un clin d'oeil à son adjointe. Elle se demanda si Opale n'était pas tombée amoureuse du félin... Elle espérait que non, cela serait trop compliqué à gérer. Repoussant ces pensées de son esprit, elle parla à nouveau :

- "Bon, si vous voulez boire quelque chose, servez-vous dans le bar. J'ai des choses à faire..."

Manière délicate de s'éclipser et de les laisser savourer leurs retrouvailles. Elle adressa un dernier sourire à Opale et quitta la pièce.

Comment décrire l'état d'esprit d'Algol? "Vide" était peut-être le mot le plus approprié. Un néant absolu qu'il n'avait plus connu depuis au moins huit mois, une situation plus simple que tout ce qu'il avait jamais vécu. Il était planté là, à l'entrée du salon de Catelyn, la femme qui s'était proclamée sa propriétaire. Celle-ci lui avait joyeusement adressé la parole (il n'avait même pas compris l'unique mot qu'elle avait prononcé) et elle était sortie en fermant la porte derrière-elle.

Si, finalement il y avait peut-être quelque chose qui émergeait de ce vide. Opale. Peut-être plus effacée et moins assurée que dans son souvenir, mais d'un autre côté il n'était pas difficile de comprendre pourquoi elle tremblait de la sorte. Lui-même réagissait de la manière inverse: d'habitude si souple et détendu, il s'était complètement raidi, la bouche entrouverte, tétanisé. Puis il avait enfin réalisé qu'elle lui avait adressé la parole. Sa voix, son sourire... Il ne rêvait pas, alors?

Le vide se remplit alors d'un seul coup, comme un barrage qui se rompt, et Algol manqua s'étouffer sous la soudaine décharge d'adrénaline. Alors elle ne l'avait pas oublié? Mais pourquoi seulement maintenant, pourquoi après huit mois, huit longs et affreux mois? Il nota alors la cicatrice qu'elle essayait tant bien que mal de dissimuler sur son bras droit. Un coup de griffe qui lui fit penser à la balafre qui marquait sa propre tempe gauche. Alors elle avait bien été là, dans ce carnage, il n'avait pas halluciné en croyant l'entendant... Il avait tant de chose à lui dire... et pourtant les seuls mots qui franchirent ses lèvres furent tout aussi banals que ceux qu'avaient prononcés Opale:

"Ca te va bien les cheveux longs."

Moment de flottement. Elle était si proche qu'il pouvait sentir son parfum, pas une de ces senteurs artificielles qu'affectionnaient les humains mais sa véritable odeur, salée avec une pointe de sucré... Avant de réaliser ce qu'il faisait, Algol oublia complètement le boîtier de son collier et le lieu où il se trouvait. Il franchit d'un simple pas la distance qui le séparait d'Opale et l'entoura de ses bras, si vivement qu'il aurait presque pu lui faire mal. Lui si précautionneux et gêné lorsque huit mois auparavant il était parti de chez elle sans oser seulement l'enlacer... Au diable toutes ces considérations: il l'avait là, dans ses bras, il sentait le contact doux de ses cheveux sur son visage et ce n'était pas un rêve, c'était la réalité. Il murmura d'une voix inhabituellement tremblante:

"Si tu savais comme tu m'as manqué... je croyais que... pourquoi n'es-tu pas venue avant?"

Ce n'était pas une accusation ou un reproche, seulement la question qu'il se posait chaque jour depuis ce maudit jour de réunion à la Thianra...

Les joues d'Opale rosirent lègerement quand Algol la complimenta sur ses cheveux. Elle le vit alors s'approcher et il la prit dans ses bras. Une grande bouffée de chaleur envahit la jeune femme mais un frisson lui parcourut tout le dos. Elle enfouit alors son visage dans le doux tissus du gilet du félin. Son odeur...Elle la rassurait, elle la rassurait tant. L'Adjointe arnaith ferma les yeux pour apprécier encore plus cette étreinte.

Huit mois...Huit mois s'étaient écoulés sans qu'elle ne puisse lui parler, ni même simplement le voir. Ses larmes se remirent à couler lentement le long de ses joues, inondant la chemise d'Algol. Opale ne faisait plus rien pour les arreter même si elle l'aurait voulu, elle n'aurait pas reussi à stopper ses sanglots. Elle voulait lui dire comme il lui avait manqué, comme le temps lui avait paru long sans lui, comme la vie était devenue tout de suite plus terne. Mais aucun son ne parvenait à sortir de ses lèvres, sa voix mourrait au fond de sa gorge.

"Si tu savais comme tu m'as manqué... je croyais que... pourquoi n'es-tu pas venue avant?"

Ce murmure à son oreille, cette voix...Elle en rêvait depuis si longtemps maintenant. Peu à peu, elle maitrisa ses pleurs et se détacha un peu d'Algol pour pouvoir le regarder dans les yeux, ses bras entourant toujours la fine taille de celui ci. La jeune femme mit un certain temps à répondre, trop occupée à contempler ses yeux de couleur miel. Un petit sourire naquit sur les lèvres d'Opale.

"Je..je savais pas...que tu était içi...Sinon je serais venue avant..."

Elle le regardait toujours dans les yeux, ses joues encore humides malgrè que ses sanglots se soient enfin arretés. Opale fronça alors les sourcils et leva une main qu'elle porta au visage d'Algol. Doucement, elle souleva la méche de cheveux qui lui cachait la tempe, revelant une cicatrice. Cependant, elle ne lui posa pas de question ne voulant pas parler de ce jour si sanglant. Opale fit retomber la méche et laissa sa main caresser son visage.

"Huit mois...C'est trop long..."

Oui trop long. Bien trop long.

Algol sentait les larmes de la jeune femme tremper sa chemise et son gilet, et il pensa soudain qu'il avait oublié de passer son foulard. Il aurait voulu paraître à Opale un peu moins prisonnier qu'il ne l'était et lui cacher ce disgrâcieux boîtier qui encombrait le côté de son cou, mais après tout, quel importance pouvait avoir un détail aussi futile dans une situation telle que celle-ci? Il sentit les bras de l'Arnaith se dénouer de ses épaules pour descendre se refermer autour de sa taille, comme si malgré le petit mouvement de recul qu'elle amorçait elle répugnait à s'éloigner de lui, et ce geste si machinal réchauffa de manière très agréable le coeur meurtri du sous-chef déchu.

Doux regard sombre qu'il craignait tant d'oublier... Mais quelque chose avait changé en Opale, quelque chose d'infime s'était éteint dans ses yeux. Algol se demanda s'il en était de même pour lui. Ce massacre de la Thianra leur avait fait tellement de mal à tous les deux... Ainsi Catelyn avait dit vrai, elle ne s'était jamais vantée de le retenir prisonnier. Pourquoi aujourd'hui alors, pourquoi d'un seul coup après tout ce temps? Il lui faudrait demander à Opale, mais ce n'était pas le plus urgent. Pour l'instant, il était encore en train de se convaincre qu'il ne rêvait pas, et que si son calvaire de créature enfermée n'était pas terminé il venait de s'alléger d'un effroyable poids.

Une caressa écarta la mèche qui lui tombait sur le visage, et il secoua doucement la tête:

"Ce n'est rien, une petite égratignure."

Il amorça un geste pour saisir la main d'Opale dans la sienne, mais la jeune femme l'interrompit en laissant ses doigts glisser le long de sa joue glabre. Un sourire incrédule vint flotter sur ses lèvres tandis qu'il lui rendait la pareille et essuyait ses traces de larmes d'un délicat mouvement du pouce.

"Huit mois...C'est trop long..."

"Oui, c'est bien trop long... mais c'est fini maintenant, n'est-ce pas?"

Se battre, se blesser l'un l'autre, se poursuivre, puis se sauver la vie mutuellement et se voir séparer pendant des lunes pour finalement en arriver à cette situation surréaliste... Algol se rappela soudain de l'obsession que la petite Laïna mettait à les comparer à la Belle et la Bête, et son sourire devint un peu triste. Il ne savait même pas si la jeune créature avait survécu à l'ignoble massacre. Algol réagit à ce désagréable souvenir en attirant à nouveau la jeune femme contre lui, comme s'il ne voulait plus jamais la lâcher. Sa main passa doucement dans la masse de cheveux dénoués tandis qu'il lui murmurait à l'oreille:

"Je croyais avoir tellement de choses à te dire, et finalement je ne sais même pas par où commencer... Tu veux qu'on aille s'asseoir?"

Il avait envie de procéder par ordre et avec une certaine méthode, comme d'habitude, mais d'un autre côté il répugnait à cesser lui-même cette étreinte pour aller rejoindre le canapé de Catelyn. Certes ce serait plus confortable, mais à présent qu'il sentait la chaleur du corps d'Opale contre le sien, sa respiration dans son cou, comment pouvait-il se résoudre à s'en éloigner ne serait-ce que de quelques centimètres? Il soupira et se força à ajouter:

"Allez, viens, après je n'essaie plus de me sauver c'est promis. Et puis tu sais que j'ai un faible pour les canapés."

Opale fit descendre la main qui caressait la joue d'Algol pour que celle ci aille rejoindre sa jumelle et ainsi entourer de nouveau la taille du félin de ses deux bras. Elle esquissa un petit sourire quand celui ci essuya ses larmes.

"Oui, c'est bien trop long... mais c'est fini maintenant, n'est-ce pas?"

"Tu as raison, c'est fini...C'est fini..."

L'Arnaith se sentit alors de nouveau attirée contre Algol et se blottit contre le corps de celui ci. Dehors, le soleil ammorçait déjà sa descente pour laisser sa place à la lune. Le temps passait trop vite. Ces huits mois lui avaient paru bien long avec leurs journées interminables et cette soirée s'écoulait à une vitesse folle. Opale ressera ses bras autour de la taille du jeune homme. Elle sentait le coeur d'Algol battre. Coeur qu'elle avait eu si peur de voir s'arreter. Comme elle s'en voulait d'être restée cachée dans le noir en attendant patiement que le combat ne cesse. Opale sentit une nouvelle vague de larmes envahir ses prunelles sombre quand une main douce et fine glissa avec délicatesse dans son cou pour aller se perdre dans sa chevelure. Il était là, bien vivant et en pleine forme comme le lui avait dit Catelyn. A chaque seconde qui passait, l'Arnaith avait peur de se reveiller et de découvrir que tout ceci n'avait été qu'un rêve. Une pure invention de son âme torturée par la perte d'un être cher. Un murmure à son oreille la tira de ses sombres pensées et elle leva la tête vers Algol.

"Si tu veut, allons nous asseoir..."

Elle eut un petit sourire. Son canapé gardait encore les traces du passage d'Algol. Traces de boue et de sang qu'elle n'avait pas reussi à enlever ou alors qu'elle n'avait pas voulu enlever. Opale desserra alors ses bras liberant la taille d'Algol de leur emprise et prit les mains du félin dans les siennes. La jeune femme marcha alors à reculons pour ne pas le lacher des yeux. Elle l'avait perdu de vue pendant trop longtemps pour lui tourner le dos. L'Arnaith se mit alors assise sur le canapé et attendit que le jeune homme en fasse de même pour se lover contre lui, la tête appuyée contre son épaule.

"Tu m'as manqué..."

Lacha t-elle subitement. Opale n'avait pas pu lui dire en temps voulu à cause des sanglots qui lui étouffaient la gorge et voulait qu'il le sache.

Algol remercia Opale d'un sourire lorsqu'elle accepta de prendre l'initiative et de l'entraîner jusqu'au canapé, sans lâcher ses mains. Il se laissa faire avec une docilité exemplaire, et le contact frais du cuir ne tarda pas à complètement disparaître de son esprit lorsque la jeune femme renouvela l'étreinte qu'ils avaient rompue. Algol l'accueillit au creux de son épaule sans faire le moindre commentaire. Son bras fit simplement le tour des bras de l'humaine pour la ramener plus étroitement contre lui tandis que son autre main, la gauche, retournait caresser cette chevelure bien plus longue que dans ses souvenirs. Il ne se lassait pas des yeux sombres d'Opale, et il s'y perdait comme elle se perdait dans les siens.

Alors il lui avait vraiment manqué... Lui même fut étonné de l'intensité du soulagement qui l'envahit à cet aveu d'Opale. Il avait eu si peur qu'elle se fût résignée, qu'elle l'eût oublié en s'efforçant de gommer de sa vie cette créature à laquelle elle n'aurait jamais dû prêter attention... Mais ce n'était pas le cas, elle venait de le lui dire, et Algol n'était pas assez idiot pour continuer à douter.

Le soleil baissait déjà sur l'horizon, et la pièce se colorait de teintes ocres dont le félin ne bénéficiait d'habitude pas dans sa petite pièce orientée à l'est. Les cheveux d'Opale en devenaient presque dorés, et sa peau semblait prendre la texture du satin. Elle était déjà étroitement serrée contre lui, et pourtant Algol avait l'impression que ce n'était pas encore assez. Il lui fallait bien se l'avouer, il mourrait d'envie de l'embrasser; il s'y était résolu tant de fois pendant sa captivité... "Si je la revois, je le fais, inutile de me préoccuper des conséquences".

Mais l'hybride s'apercevait que c'était un peu plus délicat en réalité. Evidemment il ne voulait pas effrayer Opale (et quoi qu'on en dise il est toujours troublant d'embrasser quelqu'un dont les canines sont des crocs), mais surtout il avait terriblement peur que Catelyn revienne à l'improviste et les surprenne. Lui-même s'en fichait, mais pour Opale? Alors le jeune homme se retint et son affection se cantonna à ses regards et à la caresse de sa main dans la nuque de la jeune femme.

"Qu'est-ce que tu as dit à Catelyn pour qu'elle décide si soudainement de te dire que j'étais ici? Tu lui as expliqué que..."

Il s'interrompit. Que quoi? Qu'ils étaient amoureux, c'était bien cela? Un peu difficile à dire à voix haute, mais Algol n'en pensait pas moins - d'autant plus qu'il avait la grisante impression que c'était réciproque. Quant à savoir pourquoi ce n'était pas la première chose qu'il avait dite à Opale, c'était une autre paire de manches. Peut-être qu'il préférait vraiment être sûr de ce qu'en pensait la jeune femme.

*Ou peut-être que môssieur le sous-chef de la Thianra a un peu peur, non?...*

Opale sourit lorsqu'il passa son bras autour des siens pour l'attirer encore plus à lui. Elle se detendit alors completement et laissa sa tête reposer pleinement sur l'épaule d'Algol. Son bras gauche était replié contre elle et son autre main triturait distraitement le col du gilet du félin. L'Arnaith sentait la peau douce de la créature s'étendre sous ses doigts. La jeune femme passa alors son bras autour de la taille de la créature, se resserant alors un peu plus contre lui.

Elle se mordit la lèvre à sa question, elle aurait du s'y attendre pourtant. C'était sur qu'il allait lui demander pourquoi elle réapparaissait ainsi au bout de huit mois. Question tout à fait pertinente qu'elle aussi lui aurait posée. Opale plongea son regard dans celui d'Algol et resta silencieuse un moment avant de répondre.

"Et bien on parlait du jour où la Thianra fut attaquée et...on va dire que je me suis lègerement emportée...Je lui ai ensuite dit que je me demandais où tu pouvais être et elle m'a alors tout simplement avoué que tu étais chez elle..."

Explication évasive certes mais c'était la verité. Il avait été si près d'elle durant tout ce temps lorsqu'elle venait chercher Catelyn, lui dormant surement dans la pièce voisine et elle debout sur le palier à attendre. Opale ne s'en doutait même pas. La jeune femme baissa un instant le regard avant de poursuivre son explication.

"Je lui ai alors demandé pourquoi elle ne me l'avait pas dit avant et elle m'a répondu que je ne lui avais pas posé la question...C'est vrai que j'aurais pu mais je ne me doutais pas que tu puisse être içi..."

Les joues de l'Arnaith se teintèrent doucement d'une jolie couleur rosée. Elle se sentait un peu stupide puisque Catelyn aurait été la mieux placée pour la renseigner mais non, elle avait gardé le silence jusqu'à cette après midi. Mais pourquoi n'avait elle rien dit ? Surement par peur que son amie ne se doute de quelque chose, par peur aussi que sa superieur apprenne après une bataille aussi sanglante que son Adjointe nourrissait des sentiments forts pour une créature. Sentiments qui s'étendaient bien au delà de la simple amitié. Opale n'osait même pas penser ce qui se serait passé si jamais elle serait restée silencieuse...Probablement qu'elle ne l'aurait plus revu...

La main qu'elle avait posée sur la taille d'Algol se crispa à cette pensée, s'agrippant au tissus de ses vetements. Elle avait tenu huit mois sans le voir, jamais elle n'aurait pu se passer de son sourire, de sa voix, de ses bras reconfortant durant toute une vie. Opale leva alors la tête. La peau du cou d'Algol était si près, a portée des lèvres de la jeune femme. Un baiser, un simple baiser sur cette peau pâle dont le parfum l'ennivrait...Non, elle ne pouvait pas...Ce collier l'en empechait. Certes la bande de cuir couvrait une bonne partie du cou du félin mais là juste en dessous de l'oreille...Opale s'avanca alors lègerement et juste au moment de poser ses lèvres sur la peau, elle reposa sa tête sur l'épaule du jeune homme. Elle se mordit alors la lèvre et soupira lègerement, qu'est-ce qu'elle pouvait être lâche parfois ! Mais Opale ne voulait pas qu'il le prenne mal.

"Qu'est-ce qu'il t'es arrivé après l'assaut à la Thianra ? J'aimerais savoir..."

Opale redressa alors un peu la tête et lui fit un petit sourire, ses yeux encore plongés dans ceux d'Algol. Ses si beau yeux couleur miel qui lui avaient tant manqués.

Etonnant comme les choses les plus dramatiques pouvaient parfois découler d'une simple erreur de communication... Durant tout ce temps ils s'étaient trouvés si près l'un de l'autre qu'une simple question à Catelyn aurait pu les réunir, et pourtant ils avaient tout de même trouvé le moyen de rester séparés pendant tout ce temps. Quel gâchis... Algol aurait volontiers fait un commentaire à ce sujet s'il n'avait pas alors senti une douce caresse à la base de son oreille. Un souffle, une pointe de chaleur, si peu... Mais cela suffit à le paralyser; il avait trop peu l'habitude de ce genre de sensation sur son cou, si rébarbatif cerné de cuir comme il l'était. Et pendant une seconde il osa espérer qu'Opale aurait le courage qu'il n'avait pas eu, qu'elle passerait le pas et que le souffle deviendrait contact...

Mais la tête de la jeune femme retourna se poser sur son épaule, et Algol dut retenir un léger soupir de déception. Il ne pouvait pas lui en vouloir, il ne valait pas mieux. Mais il fallait bien reconnaître qu'ainsi pelotonnés l'un contre l'autre, ils étaient très près de la ligne blanche: cette main sur sa taille, ses doigts dans ces cheveux famboyants... La question d'Opale le tira brusquement de sa rêverie et il ne put retenir un petit rire désabusé.

"Oh, pas grand chose... J'ai perdu contre Catelyn, comme tu dois t'en douter."

Il fut tout près de lui dire qu'il avait cru la voir dans la bataille et que cette distraction lui avait été fatale, mais il préféra se taire à ce sujet de peur de culpabiliser la jeune femme.

"Je me suis réveillé dans cette maison, dans la cage que contient la petite pièce de l'autre côté du hall. On avait suturé et pansé mes blessures, mais en contrepartie on m'avait rajouté ce fichu boîtier sur mon collier, on m'avait enfermé..."

Il baissa les yeux vers Opale et chercha dans les doux traits de son visage le réconfort qui lui manquait.

"Je supporte très mal ça, tu sais... Les barreaux, le collier électrifié... Même les pièces trop petites j'ai du mal sur le long terme. Oh Catelyn n'a pas été inutilement sadique et elle m'a rapidement laissé sortir de temps à autres dans le jardin, mais ce n'était pas facile. Et puis toi..."

Sa main gauche passa des cheveux à la joue de la jeune femme, avec toute la tendresse et l'affection qu'il ne parvenait pas à exprimer par la parole. Il releva la tête pour fixer la porte du couloir, avant de murmurer:

"Elle risque de revenir très vite..."

Raaah, maudite Catelyn qui le mettait sur la défensive et l'obligeait à rester en permanence vigilant alors qu'il ne demandait qu'à se laisser aller, qu'à savourer le contact de ce corps chaud contre le sien, de ces mains sur sa taille et le peu de peau apparente au niveau de sa gorge... si peu de temps pour se décider... La main d'Algol passa sous le menton d'Opale pour lui relever la tête et la regarder bien dans les yeux. Il parla doucement, si doucement qu'on aurait presque peiné à le comprendre:

"Je ne comprenais pas pourquoi tu ne venais pas me voir, j'avais si peur qu'il te soit arrivé quelque chose ou que tu te sois mise à détester les créatures après ce qu'il s'est passé à la Thianra. Je... je..."

*Je vais m'en vouloir tout le reste de ma vie si je ne le fais pas avant que Catelyn revienne...*

En moins de temps qu'il n'en faut pour dire "tant pis", ses lèvres allèrent chercher celles d'Opale. Pas très ardemment, mais bien assez pour que l'on puisse appeler ça un baiser. Algol n'alla pas très loin de peur de ne pas obtenir de réponse de la jeune femme et il préféra cesser assez rapidement. Il s'efforça d'ignorer l'enivrant goût qu'il sentait sur ses lèvres et sourit d'un air légèrement embarassé. Il se faisait l'effet d'un adolescent peu dégourdi qui échangeait son premier baiser avec une fille sans savoir si elle allait le gratifier d'un immense sourire ou d'une monstrueuse claque...

Opale l'écoutait parler attentivement, ne voulant pas perdre une miette de son récit. Mais bientôt les yeux d'Algol la captivèrent plus que ses paroles et l'univers de la jeune femme ne se resuma plus qu'aux deux pupilles verticales du félin. Elle reprit alors ses esprits lorsqu'il laissa sous entendre qu'il avait eu peur qu'elle l'ait oublié durant ces huits longs mois pendant lesquels ils ne se sont pas vu. D'un geste qui se voulait rassurant, elle passa ses doigts sur la joue d'Algol. L'Arnaith plongea son regard une nouvelle fois dans celle du félin avant de lui murmurer:

"Il n'y a pas un jour durant ces huits mois où je n'ai pas pensé à toi..."

Puis légerement embarassée par ce qu'elle venait de dire, elle baissa la tête. A peine l'eut elle fait, qu'elle sentit les mains d'Algol lui relever le visage et son regard de miel harponner le sien.

"Je ne comprenais pas pourquoi tu ne venais pas me voir, j'avais si peur qu'il te soit arrivé quelque chose ou que tu te sois mise à détester les créatures après ce qu'il s'est passé à la Thianra. Je... je..."

Opale l'écoutait puis esquissa un sourire. Ses mains sur son visage, elles étaient douces. Si douces que la jeune femme en eut un leger frisson.

"Te detester mais pourq..."

Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase que les lèvres d'Algol se posèrent sur les siennes. La jeune femme était bien trop surprise et le baiser bien trop court pour qu'elle puisse y repondre d'une quelconque manière. Le jeune homme lui sourit alors, d'un air gené. Opale jeta un bref coup d'oeil à la porte. Catelyn pouvait faire irruption dans la pièce d'un moment à l'autre. Elle retourna la tête vers le félin. Un sourire vint alors flotter sur les lèvres d'Opale. Tant pis si Catelyn revenait ou non. Elle passa alors doucement ses bras autour du cou d'Algol et se hissa afin que son visage soit à la même hauteur que celui de la créature. Elle oublia tout alors qu'elle le regardait. Envolées les stupides barrières que les hommes s'étaient amusés à dresser entre eux et les créatures, envolé le fait qu'il soit prisonnier et envolée la probabilité que Catelyn puisse interrompre leur baiser.

"Peut importe si elle arrive..."

Opale approcha alors doucement son visage de celui d'Algol, leurs souffles se melangeant pour n'en former plus qu'un seul. Tendrement la jeune femme posa ses lèvres sur celles du félin, lui rendant ainsi le baiser qu'il venait de lui faire. Elle ferma les yeux pour ne plus penser qu'à une chose: Lui.

Non, il devait tout de même rêver, une telle situation ne pouvait s'expliquer autrement. C'était plus que rocambolesque, c'était inimaginable. Il était tellement ébahi que, malgré ces longs mois loin d'elle, il avait presque l'impression qu'ils allaient trop vite... avant d'oublier bien vite ces considérations lorsque le souffle d'Opale vint se mêler au sien, et qu'une infime seconde plus tard ces lèvres qui l'hypnotisaient acceptèrent de rencontrer les siennes.

Algol frémit des pieds à la tête et ses mains glissèrent jusque dans la nuque d'Opale tandis qu'il fermait les yeux et savourait ce contact inespéré. Il n'était pas fou de joie, non. Seulement calme. Apaisé comme il ne l'avait jamais été. Elle était d'accord. Tout allait bien, tout allait merveilleusement bien. Plus de Thianra, plus d'Arnaiths, plus de morts ou de sang. Juste Opale, si douce Opale qu'il laissait réguler le baiser en lui répondant sans véritablement surenchérir - toujours cette histoire de crocs. Puis il détacha fugitivement ses lèvres des siennes, juste le temps de souffler:

"On ne devrait pas, tu vas avoir des ennuis si Catelyn revi..."

La fin de son mot s'acheva dans un murmure étouffé tandis qu'il se contredisait et allait rechercher la bouche de la jeune femme. Doucement, il approfondit son baiser et sa main gauche descendit se nouer autour de la taille d'Opale pour la rapprocher de la sienne. Son goût, son odeur... Non, ne pas perdre la tête, ils étaient déjà dans une situation assez périlleuse pour ne pas en rajouter. Algol s'imagina un instant la tête de Maman Catelyn si elle voyait sa petite Opale dans les bras du valet de pied, et il retint de justesse un éclat de rire (pas la moindre envie d'interrompre leur baiser). Et pourtant cela n'avait rien de drôle...

Le trop sage Algol se refroidit un peu à cette pensée et il se fit violence pour relâcher son étreinte sur la bouche d'Opale. Comme pour être sûr de ne pas céder à la tentation, il se pencha un peu pour resserrer encore son éteinte et soustraire à sa vue ce visage de métis qui lui manquait tant qu'il ne parvenait même plus à en rêver sans souffrir. Avec une patience infinie, il lui murmura à l'oreille:

"C'est bon, nous avons tout le temps maintenant... Ne prenons pas le risque de tout gâcher... Je ne veux pas te perdre à nouveau..."

Il serra les crocs et maudit sa propre prudence, mais il avait raison, il devait garder en tête qu'il avait raison... Il écarta d'une caresse les cheveux qui couvraient la gorge d'Opale et déposa un sage baiser juste sous son oreille. Il avait quelque chose à lui dire, des mots qu'il pensait pourtant ne plus jamais oser adresser à une humaine. Mais s'il voulait avoir une chance de sauver ce qu'il restait de sa vie, il ne pouvait plus se permettre d'hésiter. Ophélie était un beau souvenir, mais qui faisait toujours mal à évoquer. Opale était là, et à présent penser à elle ne le faisait plus souffrir. La comparaison n'avait pas besoin d'être approfondie.

"Tu sais, je crois bien que je suis amoureux de toi."

Opale ne pensait plus à rien. Le temps s'était arrêter, ces stupides secondes qui s'écoulaient rapprochant inévitablement l'heure de son départ étaient suspendues. Il n'y avait plus qu'eux, deux êtres s'embrassant sur un canapé de cuir. Les lèvres d'Algol se détachèrent des siennes et il lui murmura quelque chose. Mais avide des baisers du félin, la jeune femme avait à peine écouter son avertissement. La bouche douce se reposa alors sur la sienne alors Opale referma les yeux, resserant un peu plus ses bras autour de son cou.
Comme il faisait bon ainsi serrée contre le corps chaud de la créature. Le baiser prit alors fin et Opale s'avoua être un peu déçue. Elle lui fit un lèger sourire et posa son front contre l'épaule du jeune homme.

"C'est bon, nous avons tout le temps maintenant... Ne prenons pas le risque de tout gâcher... Je ne veux pas te perdre à nouveau..."

L'Adjointe arnaith comprit alors assez rapidement qu'il parlait d'un éventuel retour de Catelyn. Elle prit le visage d'Algol dans ses mains et lui releva la tête pour le fixer dans les yeux.

"Moi non plus je ne veut pas te perdre mais...mais on est assez grand pour savoir ce que l'on fait...et...et..."

Elle se stoppa dans son explication et le prit de nouveau dans ses bras, le tenant serré contre elle aussi fort qu'elle le pouvait. Pourquoi fallait il toujours qu'il y ait quelqu'un ou quelque chose qu'ils les empechaient d'être ensemble. Il y a huit mois, c'était cette guerre qui les avaient tenu éloignés loin de l'autre et aujourd'hui alors qu'ils se retrouvaient, ils ne pouvaient pas en profiter pleinement. Opale ferma alors les yeux, esperant qu'ils soient loin de ce salon lorsqu'elle les rouvrirait. Mais non. Ils étaient toujours là, enlacés dans les bras l'un de l'autre. Soudain un murmure à son oreille, des mots si doux...

"Tu sais, je crois bien que je suis amoureux de toi."

La jeune femme se décolla alors de lui pour pouvoir plonger son regard dans celui de miel d'Algol. Un long moment passa en silence. La jeune femme se contentait de le regarder, un vague sourire vint éclairer ses lèvres. Elle s'approcha et déposa un bref baiser sur ses lèvres, respectant le fait qu'il ne voulait pas qu'ils soient découverts par Catelyn. Elle s'en fichait pas mal, bien qu'étant sa supérieur hiérarchique, la chef Arnaith n'avait aucun droits concernant la vie privée d'Opale.

"Je crois que je...que je...crois que..."

Elle ferma les yeux et lâcha un soupir. Jamais durant les vingt deux ans de sa vie, la jeune femme n'avait jamais aimé quelqu'un autant que lui. Pourquoi alors n'arrivait elle pas à le lui avouer ? Peut être par peur qu'il lui arrive la même chose qu'à ses parents, par peur que la mort le fauche lui aussi. Opale prit une grande inspiration et ouvrit les yeux. Cela ne servait à rien de remuer le présent et de penser au futur, tout ce qui importait maintenant, c'était le moment présent. Elle se mordit la lèvre inferieure avant de lui murmurer.

"Je crois que je t'aime."

Jamais une réponse aussi brève n'avait eu un tel effet sur Algol. Pour un peu, il en aurait pris Opale dans ses bras pour sauter à travers la fenêtre sans autre forme de procès et l'emmener loin, très loin de cette guerre stupide et de ces barrières éthiques si frustrantes... Mais il y avait ce collier autour de son cou, cette barrière invisible qui le jetterait à terre d'une décharge électrique avant avant même qu'il n'ait totalement franchit le cadre de la fenêtre...

Algol recula un peu pour prendre le visage d'Opale dans ses mains et la dévisager pour la énième fois. Comme il aurait aimé voir ces traits qui lui étaient si chers perdre leur expression soucieuse, comme il aurait aimé lui dire et lui répéter qu'il l'aimait, qu'elle aussi, que rien d'autre ne comptait... Ses doigts de pianiste passèrent sur les cernes qui soulignaient les yeux marron et il murmura:

"Tu n'as pas très bonne mine... j'espère que ce n'est pas à cause de moi..."

Sa main continua sa trajectoire sur la joue, puis dans le cou de la jeune femme. Il glissa sur l'épaule, et commença à descendre vers la poitrine avant de se raviser (doucement...) et de passer sous l'aisselle pour aller entourer le dos d'Opale et la ramener contre lui. Il s'allongea légèrement dans l'angle du canapé pour offrir une position plus confortable à l'humaine, avant de lui sourire avec tendresse. Sa main libre jouait avec l'un des mèches qui tombaient devant le visage de la jeune femme. Soudain quelque chose sembla lui revenir en mémoire, et son expression se fit plus sérieuse:

"Je voudrais m'excuser pour la première fois, au cirque. Et aussi pour l'interrogatoire, et pour les égoûts. Je t'ai frappée, je t'ai fait du mal, je t'ai forcée à me raconter des choses qui te faisaient souffrir... J'ai été stupide de ne pas te voir comme je te vois à présent. Je ne te demande pas de me pardonner, mais je tiens à ce que tu saches que je suis désolé."

Il se redressa légèrement pour l'embrasser à nouveau, aussi doucement que brièvement.

"Je t'aime. Je ne te ferai plus jamais de mal et je ne laisserai personne d'autre t'en faire, je te le promets. Plus jamais."

Prétention bien ambitieuse, mais il aurait dit n'importe quoi (et y aurait cru avec ferveur) si cela avait pu ramener ne serait-ce qu'une infime pointe de gaieté dans les prunelles d'Opale. Il faillit même lui promettre de s'échapper, mais il s'interrompit à temps: elle était l'ami de Catelyn, il n'avait pas à la mettre dans une situation de choix qui n'avait pas lieu d'être. De toute façon elle devait bien se douter qu'il ne resterait jamais captif pour le restant de ses jours: il ne supportait pas les barreaux, et en plus il avait une réelle motivation pour sortir, à présent...

Un petit sourire gêné passa sur les lèvres d'Opale quand Algol lui fit remarquer sa petite mine. C'est vrai que la jeune femme manquait de sommeil. Elle n'arrivait pas à dormir: A chaque fois qu'elle fermait les yeux, son esprit se jouait encore et encore cette journée sanglante la forcant à se reveiller en sueur et à finir sa nuit pelotonnée dans le coin du canapé de son bureau envellopée dans sa couverture. Toutes ces nuits qu'elle avait passé à pleurer en regardant la lune à travers les volets mal fermés avaient inévitablement marqué son visage de deux cernes disgracieuses.

"Ce n'est pas bien grave...Je manque juste de sommeil, c'est rien..."

La main du félin passa alors sur sa joue, son cou et se dirigeait vers sa poitrine avant d'aller entourer son dos. Durant cet instant, l'humaine n'avait pas lâché le regard d'Algol, le dévorant des yeux. Il la ressera alors contre lui et elle changea de position: Elle se souleva lègerement pour aller s'assoier sur les genoux du jeune homme. Opale se blottit contre lui et enfoui sa tête dans le cou de celui ci. Elle respirait son odeur, odeur si caractérielle. Epicée sans vraiment l'être, douce sans l'être vraiment non plus. Elle leva le regard vers lui tandis qu'il s'excusait pour l'avoir frappée et interrogée. L'Arnaith se redressa un peu et posa un doigt sur les lèvres d'Algol pour lui faire comprendre qu'il n'avait rien d'autre à ajouter, qu'elle avait compris où il voulait en venir. Un doux sourire éclaira le visage d'Opale et elle plongea ses pupilles rondes dans celles fendues de la créature.

"Tu n'as pas à t'excuser pour ça. Moi aussi je n'ai pas toujours été tendre avec toi. Quand tu me frappais, je t'ai rendu tes coups...J'ai usé de mon fouet contre toi alors que j'avais parfaitement compris que tu detestait cette arme, qu'elle te faisait presque peur et pourtant cela ne m'a pas empeché de continuer à te frapper. Je ne t'en veux pas, ne t'en fait plus pour ça d'accord ?"

Elle retira son doigt des lèvres d'Algol et elle lui fit un joli sourire. Opale entoura la taille du jeune homme avec ses bras et caressait doucement son dos avec l'un de ses pouces. Elle déposa un tendre petit baiser dans le cou de celui ci, juste au dessus du collier, pour lui prouver encore une fois qu'elle le pardonnait pour tout les coups qu'il lui avait donnés.

"Je t'aime. Je ne te ferai plus jamais de mal et je ne laisserai personne d'autre t'en faire, je te le promets. Plus jamais."

Opale releva la tête. Un nouveau sourire barra ses lèvres. Bref petit sourire teinté de tristesse. La jeune femme se demandait comment ils allaient faire pour continuer leur relation à long terme alors qu'il était enfermé chez Catelyn, comment qu'elle allait réagir désormais avec la jeune femme en sachant que celui dont elle était amoureuse était retenu captif chez elle. L'humaine détacha un de ses bras de la taille d'Algol et laissa sa main effleurer sa joue, ses doigts redessinant les contours du visage de l'hybride comme pour les graver dans sa mémoire. Tandis qu'elle le regardait, elle se promit de trouver un moyen de le faire sortir de là. Il fallait qu'elle en parle à Catelyn, qu'elle reussisse à la convaincre de lui rendre sa liberté ou tout du moins de le laisser sortir plus loin que dans le jardin.

"Merci."

Opale l'embrassa doucement. Non il ne fallait pas que Catelyn les trouve dans cette position, elle devait stopper le baiser avant qu'il ne soit trop tard et qu'ils soient séparés de nouveau. Mais elle en avait tellement envie. Envie de rester à l'embrasser durant de longs moments encore. La jeune femme passa alors ses bras autour du cou du félin et se ressera contre lui prolongeant encore le baiser qu'elle lui donnait. Tant pis si Catelyn arrivait, tant pis si elle s'attirais des ennuis. Ce n'est pas elle qui l'empecherait de revenir le voir. Maintenant rien ni personne ne reussirait à le tenir éloigner d'elle. Non, rien ni personne.

Il avait tellement de choses à dire à Opale qu'à présent qu'il le pouvait, il ne savait plus par où commencer. Alors Algol prit le parti de se taire, et simplement de savourer ce corps chaud assis sur ses jambes, à moitié allongé sur lui. Ses paupières se fermèrent à demi lorsque la main d'Opale passa sur sa joue, et il se rendit compte avec une pointe d'embarras que le son qui parvenait à ses oreilles depuis quelques minutes était un ronronnement en provenance de sa propre poitrine. Il rouvrit les yeux pour adresser un sourire penaud à Opale, mais elle le coupa dans son élan d'un baiser, qui contrairement aux précédents se maintint.

"Mais Opa..."

Mais la jeune femme ne lui laissa pas le loisir de protester, ce qui tout compte fait était très bien. Elle se redressa sur ses genoux, et Algol laissa le baiser repousser sa tête sur le haut du dossier du canapé. Une partie de lui savait que c'était imprudent, mais il était tellement plus facile de s'abandonner aux caresses d'Opale, à ces lèvres qui ne voulaient pas le lâcher et à cette langue qui titillait encore assez timidement la sienne...

Les bras d'Algol se refermèrent plus étroitement autour de la taille de la jeune femme, dont il sentait avec délice le poids peser sur son corps. Puis l'une de ses mains remonta le long du dos de l'humaine pour écarter sa longue chevelure et se glisser dans sa nuque. L'ancien sous-chef accentua encore la pression de ses lèvres sur celles d'Opale, et il s'aventura à goûter un peu plus intimement la saveur de sa bouche. Une sensation si enivrante qu'il dut attendre d'être pratiquement à bout de souffle avant d'enfin pouvoir se séparer d'elle.

Un sourire joueur vint fleurir sur ses lèvres, et sa bouche alla effleurer celle de la jeune femme sans vraiment s'y attacher, pour le simple plaisir de sentir son souffle s'entremêler avec le sien. Algol s'amusa à esquisser un baiser, puis à s'éloigner sans l'appuyer pour recommencer dans la seconde. Contact aussi bref que délicieusement frustrant et aguicheur. Sans trop savoir comment, l'hybride trouva tout de même le moyen de balbutier entre deux faux baisers:

"Tu ne crois pas... qu'on devrait... plutôt réfléchir à un autre m... moyen pour nous voir, au lieu... de jouer les... ados en mal d'amour?"

Les bras d'Algol se resserérent sur sa taille alors que les bras de la jeune femme accentuérent l'emprise qu'ils avaient sur le cou du félin. Opale passa ses mains dans l'épaisse chevelure de la créature et ses doigts s'amusèrent à entortiller les quelques mèches qui baignaient la nuque de celui ci. Leurs lèvres ne semblaient pas vouloir se séparer, elles étaient scellées l'une à l'autre dans un long baiser. Les mains de l'humaine descendirent alors le long des bras de l'hybride pour les caresser tendrement. L'Arnaith appreciait ce moment d'autant plus qu'elle l'avait si longtemps attendu. Au bout de quelques temps, elle s'était résignée à essayer de l'oublier mais à chaque tentative une bribe de souvenirs apparaissait dans sa mémoire tel un diable sortant de sa boite alors Opale avait attendu, attendu ne sortant presque plus de son bureau s'assomant de factures et autres travaux en tout genre.

Le baiser prit fin et la jeune femme fixait Algol, les yeux à moitié ouverts. Elle réalisa alors qu'il lui avait manqué plus encore que ce qu'elle s'était imaginé. Celui ci s'adonna à un jeu quelque peu destabilisant mais Opale se laissait faire sans rien dire. Sentir les lèvres du félin frôler les siennes la faisait frissonner. Il murmura quelque chose qui fit froncer les sourcils de la jeune femme. Reflechir ? Voila une activité qu'elle avait cessé de faire à l'instant même où il avait franchi le seuil de la porte du salon, preferant s'abandonner dans ses bras. Elle aurait alors été tentée de lui répondre qu'ils verraient ça plus tard, qu'ils avaient le temps mais, après un bref regard vers la fenêtre, elle s'était rendu compte que la nuit arrivait plus vite qu'elle ne l'escomptait. A regrets, Opale se recula un peu et ses mains rétournèrent se loger autour du cou de la créature.

"Tu as raison..."

Un lourd silence s'installa alors dans la pièce durant lequel la jeune femme avait reposé sa tête sur l'épaule d'Algol. Elle se dandinait lègerement dans une vaine tentative de s'endormir dans les bras du félin. Elle s'était dit que si Catelyn la trouvait endormie elle l'autoriserait à passer la nuit içi mais après maintes reflections, Opale avait réalisé à quel point son imagination était débordante. De toutes façons elle avait beau se bercer, elle n'arrivait pas à trouver le sommeil. Maintenant qu'il en avait parler, l'Arnaith réalisait que le problème était assez cornélien. Comment allait elle faire pour revenir le voir de temps à autres sans eveiller les soupçons ? La question semblait sans réponse...L'esprit de la jeune femme s'était monté toutes sortes de films: Dans un, elle entrait par éfraction durant la nuit et dans l'autre, elle aidait Algol à s'échapper. Mais aucune de ses deux solutions ne semblaient être une bonne solution. En réalité, Opale n'en voyait qu'une. Pas facile à avouer certes mais c'était la seule, aux yeux de l'humaine, à pouvoir les sortir de ce problème. Elle poussa un soupir résigné avant de dire.

"Je pense que la meilleure solution serait encore de tout lui dire..."

La jeune femme leva les yeux vers Algol et elle se mordit la lèvre infèrieure: Elle ne voulait pas le perdre une seconde fois. Elle ramenna ses mains à elle et joua nerveusement avec ses doigts avant de poursuivre.

"Je sais que ça pas être une partie de plaisir de lui avouer et qu'elle va peut etre très mal le prendre, voir même me jeter à la porte mais on gagne à être honnête non ?"

En un sens, Algol était déçu d'avoir raison. Il aurait préféré que la jeune femme se mette à rire, qu'elle lui réplique qu'il racontait des bêtises et qu'elle l'empêche d'en dire davantage en continuant à l'embrasser. Lorsqu'elle s'éloigna légèrement de son visage pour réfléchir, il la laissa faire à regret. Il en avait assez d'être toujours celui qui pensait à tout. Par moment, il enviait vraiment l'insouciance (voire l'inconséquence) de gens impulsifs dans le genre de Noah. Algol sourit soudain, quoique d'un air assez désabusé: son meilleur ami et chef de la Thianra aurait préféré boire dix litres des eaux de la Seine plutôt que de croire que son adjoint était (à nouveau) tombé amoureux d'une humaine... Le sourire du léopard des neiges s'atténua. Il n'était plus l'adjoint de quiconque. Noah était aussi mort que la Thianra.

La main d'Opale dans ses cheveux le détourna quelque peu de ses funestes pensées et lui tira un léger ronronnement. Il avait toujours adoré au-dessus de tout de sentir une caresse passer sur sa tignasse, délice tellement évocateur de son côté félin qu'il le cachait d'habitude avec le plus grand soin - lorsqu'on se prétend l'égal d'un être humain, ce n'est pas très bien vu de reconnaître qu'on adore se faire gratter derrière les oreilles.

"Je pense que la meilleure solution serait encore de tout lui dire..."

Algol, qui avait à demi fermé les yeux, se redressa avec un sursaut pour dévisager d'un air stupide la jeune femme qu'il tenait dans ses bras. Elle devait plaisanter... Mais non. Le félin cligna plusieurs fois des paupières, stupéfait. Cette solution lui semblait pour sa part si improbable qu'il l'avait écartée d'entrée de jeu.

"Mais enfin, ce... c'est... Elle n'acceptera jamais!"

Dans le même temps, il comprenait la démarche d'Opale. A part une improbable évasion, ils n'avaient effectivement aucun autre moyen de se voir. Algol refusait formellement de ne pouvoir la toucher qu'en cachette, en passant la main entre des barreaux. Non, il en deviendrait fou de frustration. Mais de là à le dire à Catelyn... L'ancien sous-chef passa une main dans ses cheveux d'un air embarassé.

"C'est ton amie, tu la connais mieux que moi. Mais quand je pense à la manière dont elle a réagit l'autre jour quand j'ai fait allusion au fait qu'un humain pouvait éprouver de l'attirance pour une créature et vice versa... Tu es sûre de ne pas avoir d'autre idée?"

Il resta quelques secondes silencieux, noyé dans ce regard sombre levé vers lui.

"Si elle refuse, on ne pourra plus du tout se voir..."

Passer le temps sans savoir ce qu'il était advenu d'Opale, sans connaître ses sentiments ou ses désirs s'était avéré une torture. Mais être privé de sa présence alors qu'elle lui avait dit elle-même qu'elle l'aimait et qu'elle voulait rester auprès de lui... Algol ne le supporterait tout simplement pas. Mais il n'y avait pas d'autre solution envisageable, et il n'en était que trop conscient. D'une caresse, il effaça les rides soucieuses qui barraient le front de sa bien-aimée avant de sourire de son mieux.

"Si tu penses qu'il y a une chance pour qu'elle soit d'accord, je te fais confiance. Mais je t'en supplie, fais attention... N'oublie pas que je ne compte pas rester dans cette cage jusqu'à la fin de mes jours, je finirai bien par m'évader."

Puis il ajouta, avec cette fois une nuance d'exaspération dans la voix:

"Je n'aime pas devoir demander la permission à Catelyn. Je n'aime pas lui devoir quelque chose et je n'aime pas qu'elle fasse figure d'autorité simplement parce qu'elle m'a mis en cage."

Algol s'était relevé si brusquement qu'Opale se serait étalée sur le sol si sa main ne s'était pas fortement agrippée à la manche de l'ancien sous chef. Le haut du corps encore penché en arrière et ses doigts fermement enroulés autour du bras du félin, la jeune femme le regardait d'un air stupefait. Ce qu'elle avait dit était si étonnant que ça ? D'un souple coup de reins, elle se redressa et lacha le vetement. Elle soupira et le regarda d'un air resigné.

"Non, je ne vois pas d'autre solutions...Et puis il vaut mieux pour nous qu'elle l'apprenne par l'un de nous qu'en nous surprenant en train de nous embrasser."

L'Arnaith eut un sourire à moitié amusé: Elle imaginait déjà la tête de Catelyn et la colère qu'elle piquerait. Elle secoua alors la tête: Ca n'avait rien de drôle et puis, une fois de plus, Algol avait raison. Si elle n'acceptait pas l'amour qu'ils se portaient l'un l'autre, ils ne pourraient plus se voir. Opale commença alors à se tortiller nerveusement les doigts à s'en faire craquer les articulations. A côté de ce problèmes, les factures semblaient si simple. Elle se massa les tempes et passa ses doigts dans sa chevelure dorée, elle en avait assez. Assez de ne pas pouvoir faire ce qu'elle voulait, assez de ne pas pouvoir être avec Algol sous pretexte qu'il était une créature. Pretexte qui manquait serieusement de sens aux yeux de la jeune femme. La Thianra n'existait plus, d'ailleurs les Arnaiths marchaient un peu au ralenti sans cette organisation féline. Un nouveau sourire, moqueur cette fois, naquit sur ses lèvres: Les hommes se plaignaient de l'existance des créatures mais s'ennuyaient sans eux. La main que le félin posa sur son front la tira de ses drôles de pensées et la ramenna doucement sur Terre.

Bon, revenons en au problème qui turlupinait Opale. Comment annoncer à son amie qu'elle était amoureuse de son "félin de compagnie" et que c'était réciproque ? Elle jeta un coup d'oeil à l'horloge qui tronait fièrement dans le salon et en conclua que Catelyn ne tarderait pas à revenir. Le jeune homme fit alors allusion au fait qu'il s'échapperait bientot. Oui mais pour aller où ? Les Arnaiths avaient pris possession des anciens locaux de la Thianra et on avait donné à la jeune femme le bureau du sous chef félin, autrement dit celui d'Algol. Elle se sentit soudainement coupable pour une chose qui lui était completement sortie de l'esprit durant 8 mois: Elle habitait là où le félin passait le plus clair de son temps avant la guerre bien sur.

Le ton de l'hybride se fit plus dur. Opale fronca les sourcils: Elle ne lui connaissait pas ce ton aussi froid, presque méchant. Elle prit délicatement le visage au teint diaphane de la créature entre ses mains et l'approcha du sien. Leurs nez se touchaient et Opale s'amusait à caresser celui du jeune homme avec le sien. Elle le fixait tendrement dans les yeux, un doux sourire se peignit sur ses lèvres.

"Tu n'auras bientot plus rien à lui demander...Fait moi confiance."

L'Arnaith n'en dit pas plus, se contentant de lui sourire. Elle comptait essayer de convaincre Catelyn de le relacher, ce qui ne serait pas une mince affaire.

Algol ne put que sourire en retour à la délicieuse jeune femme qu'il tenait dans ses bras. Il était prêt à dire n'importe quoi pour que ce visage tant aimé conserve pareille expression de joie, pour que plus jamais ces si beaux yeux sombres ne s'éteignent. Il interrompit un instant le petit jeu d'Opale pour rattraper ses lèvres d'un sage baiser, avant de lui assurer d'une voix douce:

"D'accord, je te fais confiance. Mais promets-moi une chose en échange."

Il s'écarta un peu d'elle et ses mains allèrent encadrer son visage soucieux, les longs doigts diaphanes caressant avec douceur les joues un peu trop pâles. Algol souriait, et ses yeux d'ambre ne se lassaient pas de parcourir les traits fins de la jeune femme, comme pour en inscrire chaque détail, chaque infime caractéristique dans sa mémoire. Mais l'ancien sous-chef n'avait hélas pas le temps de se consacrer à cette tâche, aussi cruciale fut-elle. Son expression devint plus sérieuse, sans pour autant se départir de cette profonde tendresse qu'il avait trop rarement l'occasion d'exprimer.

"Si cela ne se passe pas bien, que Catelyn refuse tes arguments... ne t'entête pas, et ne te sens pas coupable, d'accord? Tu auras essayé. Si ça ne marche pas, ce n'est pas grave, on trouvera autre chose."

Il ne put résister à la tentation d'embrasser encore une fois la jeune femme, ivre de chaque seconde qu'il pouvait passer à goûter sa peau claire de ses lèvres. Sa bouche glissa le long de la mâchoire d'Opale pour aller déposer un baiser juste sous son oreille, à travers la chevelure dorée qui cascadait en abondance sur ses épaules. Les yeux clos, la tête enfouie au creux du cou d'Opale, Algol murmura avec dévotion:

"Je t'aime. Elle peut ne pas le comprendre, mais elle ne pourra pas l'empêcher. C'est pour ça que je te fais confiance. Essaie, et n'aies pas peur si ça rate, elle ne nous séparera pas aussi facilement."

Comme il aurait aimé que la situation fût aussi simple que cela... Tout cela n'était pas juste. Algol avait déjà tout perdu, et voilà qu'on menaçait de lui enlever la dernière chose qui comptait vraiment à ses yeux, sous le simple prétexte d'une manipulation génétique douteuse. Pourquoi n'avaient-ils pas ce droit si fondamental de rester dans les bras l'un de l'autre, pourquoi l'ancien sous-chef avait-il l'impression de commettre une faute à chaque baiser qu'il déposait dans la gorge d'Opale?

Il interrompit soudain ses caresses: peut-être parce qu'il avait aussi quelque chose à dire à la jeune femme, et qu'il avait intérêt à le faire avant le retour de Catelyn... Algol déglutit avec peine, et il se força à s'arracher au contact chaud de la peau de sa bien-aimée pour pouvoir la regarder dans les yeux. A cet instant, il aurait presque désiré que la chef des Arnaith revienne plus tôt que prévu et qu'elle l'interrompe dans son élan. Mais l'ouïe aiguisée du sous-chef ne distinguait ses pas qu'à l'étage.

"Opale, avant que tu prennes le risque de perdre ton amie et que ça n'aille plus loin entre nous, je... il faut que tu saches quelque chose d'important à mon sujet."

Pour la première fois de la conversation, il détourna les yeux. Comment lui dire une chose pareille? Avec une hésitation qui ne lui ressemblait guère, le jeune félin commença à parler avec l'expression de quelqu'un qui s'apprête à faire du saut à l'élastique sans être certain que ce dernier soit solide...

"J'ai déjà voulu te le dire lorsque tu m'as sauvé et ramené chez toi, mais... j'avais peur... j'ai toujours peur de t'effrayer, de te faire fuir. Mais je te dois bien ça. Si tu préfères mettre un peu de distance entre nous par la suite, je... je comprendrais..."

Il s'humecta les lèvres et déglutit avec difficulté. Il devait lui raconter l'histoire d'Ophélie, il le devait absolument. A tout les coups, Catelyn le ferait à sa place si Opale lui demandait de relâcher sa créature domestique. Et pourtant, ce risque de perdre la jeune femme... Un bruit alarmant à l'étage le poussa à se décider. Sans réfléchir, il inspira profondément et sauta dans le vide.

"Je suis malade. Mentalement. A cause des manipulations génétiques je pense. J'ai parfois des accès de violence qui... qui me poussent à faire des choses horribles. Tu as failli en faire les frais au cirque, si tu te rappelles bien. En fait, lorsque je suis dans cet état, je... je ne sais plus à qui je m'attaque. Je peux faire du mal à des gens que j'aime, que j'adore. Mon ancienne compagne... c'était il y a très longtemps... C'est moi qui l'ai tuée, Opale. Je ne le voulais pas, je te jure que je ne le voulais pas. Je cherchais à la défendre. Mais quand j'ai repris conscience de ce que je faisais, il était trop tard..."

Algol avait déjà baissé la tête. Cette fois il ferma les yeux. L'idée d'avoir à subir un regard horrifié de la part d'Opale lui transperçait le coeur.

"Je ne veux pas te faire de mal, pas à toi. Je t'aime de tout mon coeur, mais j'ai tellement peur qu'il arrive un accident... Je te le dis encore une fois, si tu préfères partir, ou au moins prendre du temps pour réfléchir, je ne t'en voudrai pas. J'aurais tellement aimé t'en parler plus tôt..."

Opale rendit son baiser à Algol et l'écouta en le fixant dans les yeux. Elle blotti alors sa joue dans la main douce et chaude qu'il avait posé sur son visage tout en laissant échapper un mince soupir. Bien que la condition que lui imposait le jeune félin ne lui plaisait guère, elle acquiesca d'un signe de tête. D'accord, elle n'insisterait pas enfin presque pas. La jeune femme était quelqu'un d'assez têtu et adorait avoir le dernier mot.

"Comme tu veux. Je n'insisterai pas."

Répondit l'adjointe Arnaith comme si elle en avait été forcée. Algol devait bien se douter qu'elle ferait tout ce qui était en son pouvoir pour le faire sortir de là. Pourtant, elle ne voulait pas perdre Catelyn. Sa seule et unique amie à Paris. Opale ferma les yeux et se mit à réflechir. Est-ce qu'il était preferable qu'elle n'insiste pas et que l'ancien sous chef reste captif ou alors devait elle faire des pieds et des mains pour le faire sortir sans ménager son amitié avec Catelyn ? Elle soupira de nouveau. Catelyn ou Algol ? Algol ou Catelyn ? Trop de questions se bousculaient dans l'esprit embrumé de la jeune femme. Un souffle dans son cou l'extirpa de ses sombres rêveries et un murmure à son oreille la fit sourire. Il l'aimait...Elle l'aimait...Tout allait bien donc. A quelques détails près pourtant: Une cage et un collier électrifié. Opale se recula un peu pour pouvoir le regarder et déposa un baiser dans son épaisse chevelure.

"Opale, avant que tu prennes le risque de perdre ton amie et que ça n'aille plus loin entre nous, je... il faut que tu saches quelque chose d'important à mon sujet."

La jeune femme fronca les sourcils. Elle ne lui connaissait pas ce ton hésitant mais c'est surtout le fait qu'il ait soudainement baissé les yeux qui alarma Opale. Qu'avait il à lui dire de si important pour qui ne puisse même pas la regarder en face. Elle profita d'une coupure de la part d'Algol pour lui dire d'un ton qui se voulait rassurant bien que la jeune femme ne l'était pas.

"Bien sur, je t'écoute."

Et elle l'écouta attentivement. A ce moment, elle aurait preferé être sourde. Opale n'arrivait pas à le croire. Non, ce n'était pas possible, il lui mentait. Oui, c'était surement un mensonge. Algol n'était pas un meurtrier. La preuve, il lui avait sauvé plusieurs fois la vie. Elle aussi avait détourné le regard completement abasourdie par les révelations du félin. Elle fixait le mur qui se trouvait en face d'elle. Ses lèvres s'entrouvaient et se refermaient de surprise, une phrase frappant sans cesse dans son esprit: C'est moi qui l'ai tuée...C'est moi qui l'ai tuée...L'Arnaith était comme paralysée pourtant son corps lui dictait de se lever, de mettre un terme à cette relation avant qu'il ne lui arrive la même chose qu'à cette malheureuse. Mais elle ne pouvait pas bouger, elle n'y arrivait pas. Opale était là, assise sur les genoux d'Algol, les bras balants, à écouter son sanglant recit.

Après des longs instants, elle se rendit enfin compte qu'il avait arrêté de parler. Elle osa enfin baisser son regard terrifié esperant rencontrer celui du jeune félin et que celui ci lui dise que c'était une farce, une sorte de poisson d'avril avant l'heure. Mais non, elle ne distingua du visage d'Algol que le haut de son crâne. Il était sérieux, elle devrait se faire à cette idée. Dans une impulsion, elle posa ses mains sur les bras de l'ancien sous chef pour y prendre appui et se relever. Réflechir...Oui, c'est ça qu'elle devait faire. Mettre de l'ordre dans ses idées et revenir le voir pour qu'ils en parlent à tête reposée un peu plus tard quand le choc serait encaissé.

Le regard de l'Arnaith tomba une nouvelle fois sur Algol juste au moment où celle ci allait se lever. Jamais elle ne l'avait vu dans cet état. Il semblait vraiment regreter son geste et puis ce n'était pas de sa faute. Elle ne devait pas l'oublier, ce n'était pas sa faute mais celle de ces scientifiques peu scrupuleux qui l'avaient croisé avec un léopard. Ses mains glissèrent lentement le long des bras du jeune homme et Opale le serra contre elle, caressant tendrement ses cheveux.

"C'est...c'est du passé Algol...Je t'aime et je te fais confiance...Je sais très bien que tu ne me fera pas de mal..."

Comment avaient-ils pu en arriver là? L'instant d'avant, tout était ocre et pastel, il s'embrassaient et faisaient des projets. Et maintenant, Algol se sentait séparé d'Opale par un mur, un silence glacé. Ses paupières closes se serrèrent davantage et il sentit sa mâchoire se contracter dans le vain espoir d'extérioriser un peu de cette profonde douleur qui vrillait sa poitrine. Il était idiot, effroyablement idiot. Comme si Opale allait simplement lui répliquer "ce n'est pas grave ça ne se reproduira pas"... Bien sûr qu'il lui avait fait peur, et bien sûr qu'il allait la perdre - quelle jeune femme saine d'esprit accepterait d'entamer une relation avec un homme qui a les mains pleines d'un sang aussi odieux? Il sentait l'horreur de l'Arnaith dans ses jambes pliées contre les siennes, dans les mains qu'elle avait posées sur ses bras pour s'y appuyer en vue de se lever...

Et pour couronner le tout, Algol sentait les larmes lui monter aux yeux. Finalement pas besoin d'accuser Catelyn, il était tout à fait capable d'anéantir lui-même son propre bonheur. Mais qu'aurait-il pu faire d'autre? Ne rien dire à Opale? Il y aurait été contraint tôt ou tard, ou pire, elle l'aurait appris de Catelyn. Et puis lui cacher le danger qu'elle accepterait aveuglément de côtoyer... non, il l'aimait trop pour cela. Mais à présent, comment allait-elle pouvoir le regarder autrement que comme un fou dangereux, comment allait-elle pouvoir lui faire confiance? Tout cela, Algol en avait conscience, et c'était pour cela qu'il avait proposé à Opale de s'éloigner un moment. Qu'il lui avait dit qu'il comprendrait. Il n'avait pas précisé à quel point cela le détruirait, mais si c'était mieux pour la jeune femme... L'ancien sous-chef laissa échapper un long soupir las: qu'elle se lève et qu'on en finisse. C'était trop beau pour fonctionner.

Alors, contre toute attente, les mains d'Opale ne quittèrent pas ses bras. Elles se glissèrent autour de lui, dans sa nuque et son dos, et Algol sentit avec incrédulité la jeune femme l'attirer à elle. Il s'attendait tellement à la voir partir qu'il ne comprenait pas ce qu'il se passait. Jusqu'à ce qu'une douce caresse passe dans ses cheveux, et qu'il entende une voix à peine vacillante lui murmurer:

"C'est...c'est du passé Algol...Je t'aime et je te fais confiance...Je sais très bien que tu ne me feras pas de mal..."

L'ancien sous-chef prit une éternité pour interpréter ces quelques mots. Puis ses bras amorphes reprirent vie et allèrent se nouer autour de la taille d'Opale tandis qu'il étouffait un sanglot au creux de son épaule. C'était vrai? C'était bien vrai, elle ne le repoussait pas? Il sentait bien au ton de la jeune femme que quelque chose avait changé, mais le fait qu'elle lui laisse une chance de se rattraper, de combler le fossé... Pour un peu, il se serait mis à pleurer de soulagement. Tremblant de tous ses membres, sa voix étouffée par le tendre contact de la gorge d'Opale dont il ne voulait pas éloigner son visage, il répondit très vite:

"Je ne te ferai pas de mal, jamais. Je ne veux pas. Je... je sais que je peux me retenir, j'y suis bien arrivé le jour de l'assaut de la Thianra. Parce que je croyais avoir entendu ta voix. J'avais peur que tu sois trop près de moi si je... si je..."

Et voilà, il s'était tout de même mis à pleurer. Lui qui mettait un point d'honneur à garder intacte son image de sous-chef inflexible, voilà qui était réussi... Mais il avait renoncé à se calmer. Il s'enivrait de l'odeur d'Opale, senteur indéfinissable qu'il n'associait maintenant à plus rien d'autre qu'à de l'amour et de l'espoir. Dieu que la question de son enfermement paraissait secondaire à présent... Il changerait, il voulait changer. Pour elle, il était certain d'y arriver. Et pour son plus grand bonheur, elle le croyait aussi.

"Je trouverai un moyen de me soigner, je te le promets, je dévaliserai tous les laboratoires du pays s'il le faut mais je trouverai. Je... Merci Opale, merci de tout coeur."

Il chercha autre chose à ajouter, quelques mots qui pourraient rentranscrire fidèlement tout l'amour qu'il lui portait en cet instant. Un seul lui vint à l'esprit, et il répéta:

"Merci."

Au contact des bras d'Algol autour de sa taille, la jeune femme ressera son étreinte. Elle sentait à présent les larmes de celui ci couler lentement le long de ses joues collées à sa gorge. La main qu'elle avait posée sur le dos du félin se crispa en même temps qu'elle fermait les yeux. Comment avait elle pu songer à partir ? A l'abandonner là sans même chercher à comprendre le pourquoi du comment ? Opale se degoutait...Elle pretendait l'aimer et pourtant elle n'aurait pas hésiter à s'enfuir au premier problème.

Les sanglots du jeune homme redoublèrent, ses membres tremblant un peu plus encore. Assise sur ses genoux, l'humaine lui caressait tendrement la chevelure épaisse dans l'optique de le calmer un peu. Il lui promit alors de changer, de se soigner. Un petit sourire naquit sur les lèvres de l'Arnaith, elle ne voulait pas qu'il change, elle l'aimait comme ça...Même si l'idée de s'enfuir lui avait traversé l'esprit l'espace d'une seconde. Pourtant la simple pensée qu'elle pourrait être tuée par celui qu'elle aimait lui faisait peur...Affreusement peur. Mais être séparée de lui était encore pire.

"Merci."

La jeune femme déposa un doux baiser dans les cheveux d'Algol et s'éloigna un peu de lui pour prendre son visage entre ses mains. A l'aide de ses deux pouces, Opale effaca les marques salées des larmes qui barraient les joues pâles du félin et le fixa dans les yeux. Les lèvres de l'Arnaith étaient peintes d'un joli sourire d'une infinie tendresse.

"Je t'aiderai. Et même si on ne trouve pas de moyen de te soigner, je te promets que je ne te laisserai pas. Jamais."

Que de promesses en quelques minutes...Autant de mots qui s'étaient envolés dans le salon de Catelyn baigné par le soleil couchant. Opale était sincère, on ne peut plus sincère. Elle ne voulait pas le perdre alors qu'elle venait seulement de le retrouver. L'humaine approcha son visage de celui du sous chef et elle l'embrassa tendrement comme pour appuyer encore un peu plus sa promesse. Elle se recula et ses pouces continuaient à parcourir les joues humides de la créature.

"Pour le moment, tu dois sortir d'ici..."

Oui parce qu'avant d'aller dévaliser les laboratoires du pays, comme Algol venait si bien de dire, il fallait d'abord qu'il trouve un moyen de se débarrasser des barrières électriques érigées par le collier qui encerclait son cou. Un bruit provenant de l'étage la fit lever la tête. Catelyn n'allait surement pas tarder à redescendre. Comme cette soirée était passée vite...Trop vite au gout de l'Arnaith. Elle esperait que son amie tarderait à venir leur laissant ainsi encore quelques minutes. Opale lui fit un sourire et l'embrassa sur le front.

"Quand tu sera dehors, on ira chercher une solution à ton problème...Tout les deux."

Finalement, il était plutôt doux à Algol de se laisser aller de la sorte, de pleurer sans se préoccuper de son image... et surtout d'avoir quelqu'un qui le serrait dans ses bras, qui n'aspirait qu'à le consoler. L'ancien sous-chef savait qu'il avait du mal à encaisser la douleur en solitaire, et pourtant il s'était contraint à le faire pendant tant d'années qu'il avait renoncé à les compter. Et à présent qu'il avait enfin l'occasion de se libérer, qu'il avait enfin trouvé celle auprès de laquelle il avait envie de se réfugier, il n'éprouvait qu'un grand, qu'un immense soulagement. Douce Opale, aussi précieuse que la pierre dont elle portait le nom. Chacune de ses caresses touchait Algol au plus profond de lui-même, et bientôt son corps tremblant retrouva son calme, et ses sanglots s'atténuèrent pour ne laisser que quelques dernières larmes silencieuses.

Alors la jeune femme s'écarta un peu, et lorsque que ses fines mains l'incitèrent à relever la tête en se posant sur ses joues, il s'exécuta de bonne grâce. Il avait cru ne plus jamais avoir le courage de la regarder dans les yeux, de peur d'y découvrir cette étincelle de méfiance tant redoutée et pourtant si légitime. Mais s'il ne put lire avec exactitude les sentiments qui passaient dans les iris bruns d'Opale, il comprit instinctivement qu'il n'était plus question pour elle de s'en aller, et que ses promesses étaient profondément sincères. Un sourire éperdu de reconnaissance s'afficha lentement sur le visage défait du félin, qui n'en revenait toujours pas qu'elle n'ait pas fuit dans la seconde, et qu'elle soit restée là à sécher ses larmes...

Lorsqu'elle lui répéta qu'il fallait avant toute chose le faire sortir de cette maison, Algol hocha docilement la tête, incapable d'utiliser sa voix brisée par les sanglots. Il n'était pas dupe, et il savait bien que jamais Catelyn ne le relâcherait - elle lui avait expliqué en long, en large et en travers que s'il sortait il reformerait la Thianra, et qu'en tant que chef des Arnaiths elle ne pouvait absolument pas le laisser faire. Mais d'un autre côté, l'ancien sous-chef ne pouvait s'empêcher de croire en la détermination d'Opale, et il espérait sincèrement que Catelyn les laisserait se voir, au moins se voir... La jeune femme déposa un autre baiser sur ses lèvres, et Algol ferma les yeux avec un délice évident. A cet instant, il n'était plus si obsédé par son statut d'animal en cage: Opale l'aimait toujours, même en sachant pour Ophélie, et rien d'autre ne comptait. Que sa "propriétaire" accorde un droit de visite à sa bien-aimée était la plus belle chose qu'il consentait à envisager.

Mais le temps passait, il filait à toute allure, bien plus vite que d'habitude évidemment. Et les pas à l'étage migraient vers le hall, les escaliers... Catelyn devait en avoir assez de tourner en rond dans sa propre maison. A regret, les paupières toujours closes, Algol souffla:

"Elle arrive..."

Puis il ouvrit les yeux et sa main droite s'éleva grâcieusement jusqu'au visage d'Opale pour passer sur sa joue, comme s'il avait envie de garder en mémoire le moindre détail de ces si beaux traits, la moindre variation de température sous cette peau si désirable... Sa bouche alla chercher celle de l'Arnaith, alors même que les pas de Catelyn résonnaient dans l'escalier. Repousser le plus possible ce moment où la jeune femme devrait se lever, le priver de la chaleur de ses cuisses... Mais comme elle l'avait dit elle-même, il n'était pas du meilleur effet que son amie les surprenne enlacés de la sorte. Alors Algol accepta de relâcher l'emprise qu'il avait sur les lèvres d'Opale, et il murmura encore, tout près d'elle:

"Ne vas pas trop loin, si elle nous autorise à nous voir ce sera déjà merveilleux... si tu savais à quel point je t'aime..."