Répétition

Nyarai s'en alla, laissant Reyn seul avec ses interrogations et ses doutes. Le temps lui sembla interminable et son imagination s'emballait. Et si ils décidaient de l'enfermer et de retrouver son propriétaire? Il ne suporterait pas d'être enfermé... La porte qui s'ouvrit l'interrompit dans ses pensées. Il se leva brusquement et regarda l'humain qui lui faisait face. Il était grand avec un sacré bidon... Il avait tout du monsieur loyal comme se les imaginait Reyn. Il s'adressa à lui sans ambages, allant droit au but, ce qui déboussola un peu le félin. Il se reprit vite et répondit d'une voix calme et grave :

- "Oui, c'est ça..."

Il aurait voulu jeter un coup d'oeil à Nyarai, mais elle était restée dehors et le bonhomme prenait toute l'envergure de la petite porte. Il ne savait pas ce que Nyarai lui avait dit aussi se gardat-il de rajouter quelque chose à ce sujet, pour ne pas tenir un discours contradictoire.

- "Je m'appelle Reyn. Et j'aimerais rester ici... quelques temps."

"Quelques temps... On ne fait pas vraiment dans l'aide aux créatures, ici..."

Il décroisa ses gros bras, levant une main imposante jusqu'à son menton assez carré et regarda le félin de haut en bas, un peu comme pour l'évaluer, ou pour voir si quelque chose n'était pas sincère dans cette demande rapportée par la lionne. Mais apparemment il ne trouva pas grand chose puisqu'il enchaîna les mots.

"La p'tite m'a dit que ton maître te faisait du mal, donc on peut pas te forcer à y retourner, c'est pas correcte. Par contre si ton maître vient de lui-même te chercher, là ça risque de poser des problèmes."

Se son menton, sa grosse main passa derrière sa tête pour gratter sa tignasse épaisse. Vraisemblablement, le monsieur loyal ignorait tout de l'état du maître en question.

"Enfin bon, si toi t'es prêt à prendre ce risque, je vois pas pourquoi on te mettrait dehors. Par contre il y a quelques petits détails à régler si tu compte demeurer ici."

Et à nouveau il recroisa les bras sur son gros bedon, cachant toujours entièrement la porte qui donnais sur l'extérieur où Nyarai commençait à se mordiller nerveusement la lèvre inférieur, ne pouvant qu'écouter passivement la conversation, ce qui apparemment lui courait sur les nerfs.

Reyn se raidit imperceptiblement aux premières paroles de l'homme. Il trouvait ça assez insultant, mais peut-être était-il un peu trop soupe au lait? L'homme ne semblait pas penser à mal et ne faisait qu'énoncer un fait... Il se retint de se dandiner nerveusement devant l'examen silencieux dont il était l'objet et se contenta de relever le menton et de tenter de rester impassible, avec plus ou moins de succès d'ailleurs.

Le monsieur Loyal reprit la parole. Ainsi Nyarai lui avait raconté qu'il était maltraité... Ce qui était vrai d'ailleurs. Les marques sur son dos le montraient bien. Il avait plutôt bien cicatrisé, mais là où le fouet avait mordu la peau, il y avait une légère boursouflure encore rouge. Il savait bien qu'il garderait ces marques à vie... Il se retint de lui assurer que son maître ne viendrait jamais le chercher. Cela interpellerait le bonhomme.

Mais, il rejeta la question et accepta que Reyn reste... sous certaines conditions. Quelles conditions? Intrigué, le jeune félin prit enfin la parole :

- "J'assumerais ce qui se passera s'il me retrouve."

Il se passa une main nerveuse dans les cheveux, avant de regarder l'homme de ses yeux d'or.

- "Quelles choses à régler?"

Le bonhomme plissa les yeux en constatant cette nervsité dans l'attitude du Guépard. Il mit facilement ça sur le compte du soucis d'être aidé. Après tout, pourquoi la "p'tite" lui aurait-elle menti sur la situation?

"Ben tu vois, le cirque n'est pas riche, donc on ne pourra t'entretenir que pendant un certain temps. Le temps que tu te remette de tes blessures. Après..."

Il suspendit un instant ses paroles, comme si il cherchait un moyen d'expliquer la situation. Assurer le nécessaire pour quelqu'un n'était pas vraiment dans les moyens d'un cirque, à moins que cette personne soit active au sein de cette "famille" d'artistes, auquel cas la situation serait différente. Il restait à dire tout ça avec un minimum d'explications.

"Après tu as plusieurs possibilités. Ou tu débrouille seul.. Ou on pourrait te trouver du boulot dans le cirque, et partir du principe qu'on compte dans ton salaire les vêtements, la nourriture, et un lit chaud."

Oui, l'aide gratuite pouvait aller un temps, mais ce serait risquer aussi le confort d'autres membres de la troupe qui eux avaient l'avantage de l'ancienneté au sein du cirque.

"Est-ce que ça peut t'aller comme ça?"

Reyn était suspendu aux lèvres du Monsieur Loyal. Il lui semblait évident qu'on ne pouvait pas l'entretenir sans contreparties... Un cirque était une entreprise et il fallait la faire marcher. Chaquen membre devait trouver s aplace et s'y tenir. Il s'humecta les lèvres nerveusement.

*Bon Dieu Reyn, contrôle un peu tes nerfs!*

Il se força à se détendre, alors que l'homme proposait de l'embaucher... Reyn hésita. Quel genre de boulot? A travailler dans les coulisses? Sous les feux de la rampe? Spurement la première otpion... il n'avait aucun don exceptionnel, si ce n'est une grande souplesse et un équilibre à toute épreuve. Mais de là à s'en servir pour faire le zozo sur une piste..

- "Vous seriez prêt à m'embaucher? C'est ça?"

Il était plus que surpris par cette offre, somme toute généreuse, envers une créature fugueuse.

- "Pourquoi? Pourquoi m'aidez-vous?"

Il semblait vraiment se poser la question ce qui trahissait un passé où il n'avait pas vraiment eu le droit à de l'aide désinteressée. Cela le dépassait qu'un humain puisse aider une créature, simplement parce qu'elle a été battue et est sans ressource... Il soupira et demanda :

- "Quel genre de boulot?"

Pourquoi? La réponse paraissait évident pour l'imposant monsieur Loyal. Mais sur ce détail il s'abstint de répondre tout de suite. Après tout, ce n'était pas nécessairement utile de tout vouloir justifier.

"Pour le boulot, ça dépendra de toi. Si tu es doué, pourquoi ne pas faire un numéro, seul ou avec quelqu'un, et si ça ne t'interresse pas, on n'a jamais trop de bras pour transporter le matériel, préparer la piste ou surveiller la marmaille des collègues."

Il y avait toujours quelque chose à faire dans un cirque. Qu'il s'agisse de préparation à un spectacle ou d'un simple balayage devant les caravanes, le moindre employé était utile.

"Et si on t'aide, c'est sans doute parce que c'est toujours dans un cirque que les gens différents ont trouvé leur place. Mais bon, pour le moment, t'occupe pas de ça, il faut d'abord que tu te remette en état. Blessé, tu ne pourras pas faire grand chose de toute manière."

Sa grosse main balaya l'air d'un geste négligent, signifiant le peu d'importance d'en débattre d'avantage sur la question. Après tout, rien n'était pressant, et rien ne pourrait se faire convenablement tant que le félin n'aurait pas repris des forces, c'était évident. Le gros bonhomme fit demi-tour, assez difficilement étant donné sa carrure, et s'extirpa hors de la caravane. Nyarai s'était empressée de s'écarté, gardant les yeux baissés encore et toujours

"Si jamais t'as des questions, tu me trouveras dans la dernière caravane, la grosse rouge."

Après avoir lancé ces dernières paroles vers l'intérieur de la caravane, il posa une grosse main sur la tête de Nyarai, s'attardant encore un peu si le Guépard avait des questions immédiates.

Reyn écoutait attentivement le directeur du cirque. Faire un numéro? Seigneur... S'il n'avait pas été si nerveux, il en aurait ri en s'imaginant avec une tenue un peu trop moulante, de celles que portent les artistes de cirque. Jamais, il ne pourrait porter un truc comme ça et jamais il ne pourrait faire des trucs devant une foule. Mais bon, on verrait, cela ne pressait pas.

Il lui donna alors une réponse à sa question. Parce qu'au cirque les gens différents trouvaient leur place. Vraiment? En tout cas, Nyarai ne semblait pas avoir menti quand à la gentillesse de ces humains là, il devait bien l'admettre. L'homme fit demi-tour et commença à s'en aller, lui indiquant sa caravane s'il y avait des questions. Il en avait des centaines et aucune à la fois...

- "D'accord. Merci."

Si un jour il avait pu penser dire ça. Remercier un humain. Peut-être y avait-il de l'espoir finalement... Le directeur posa une main sur la tête de Nyarai, il pouvait la voir maintenant et s'en alla. Reyn était encore surpris d'avoir été accepté si facilement. Il s'assit donc, se plongeant dans ses pensées un instant. Quand il releva la tête, il vit Nyarai et eut un petit sourire en coin.

- "Il semblerait que vous aviez raison à leur encontre. Je dois avouer qu'il est bien serviable, bien qu'un peu bourru. Si les autres sont ainsi, alors je pense que j'ai trouvé un nouvel endroit où recommencer ma vie..."

Encore dehors, Nyarai regarda le patron s'en aller avec malgré son soulagement un petit pincement au coeur. Oh, il était gentil, oui. Très même. Mais pas inconscient. Et même si il aidait Reyn, elle était certaine ou presque que ce dernier sera malgré lui sous une certaine surveillance. Après tout, pour bien vivre dans une famille, il faut que tout le monde s'entende, non? Mais Nyarai n'avait pas le coeur à enlever un espoir si bien gagné. Et puis il y avait fort à parier qu'il saurait vite se faire apprécier au sein du cirque, non?

Elle se détourna et entra à nouveau dans la caravane, laissant la porte ouverte pour que l'air du soir entre sans peine, et les sons aussi. Sous peu, les préparatifs seraient terminés, les premiers spectateurs s'approcheront et le spectacle devrait recommencer comme à chaque couché de soleil. Mais il n'était pas encore l'heure et bien que toujours un peu intimidée, Nyarai offrit un faible sourire en relevant les yeux sur le Guépard.

"Oui, ils sont gentils, chacun à leur manière."

Tous avaient leurs particularités, et plus elle y pensait, plus il lui semblait évident que Reyn allait s'intégrer sans trop de problèmes. Après tout, ici, on ne frappe pas, du moins en théorie. Ici, si on faisait preuve d'efforts, même sans réussite, on était apprécié.

"Mais il a raison, il faut d'abord que vous repreniez des forces, donc... Si vous avez besoin de traitements, de bandages ou ce genre de chose, il suffit de le dire, j'irai en acheter si il en manque."

Reyn remarqua l'expression songeuse de Nyarai et sa manière de modérer ses propos à l'endroit du directeur. Il n'était pas dupe au point de croire qu'il avait sa confiance, mais le fait de ne pas avoir été enfermé ou enchaîné le laissait un peu plus optimiste.

Elle aborda alors le sujet de sa santé et il hésita un moment. Ses plaies n'étaient pas infectées et cicatrisaient bien. Mais peut-être que mettre un produit dessus ne serait pas un mal après tout. Il la regarda un moment et se mordilla la lèvre inférieure. La douche avait permis de bien nettoyer... Mais mieux valait être prudent. Et puis, il n'avait pas pu bien voir l'était de son dos non plus...

- "Euh... J'aurais peut-être besoin de quelque chose à mettre sur mes plaies oui... Enfin, je ne sais pas, je ne les ai pas vue... Ca vous dérangerait de regarder et de mettre quelque chose dessus le cas échéant?"

Il joignit le geste à la parole et retira le sweat que Nyarai lui avait prété, dévoilant ainsi un torse aux muscles fins, sans un poil de graisse. Il hésita à nouveau, avant de hausser les épaules et de tourner le dos à la lionne, lui montrant ainsi un dos zébré de coupures plus ou moins superficielles et enfllammées pour certaines.

A la vue des blessure, Nyaraï entrovrit les lèvres dans une expression retenue d'horreur avant de s'empresser de baisser les yeux, douloureusement. Quelles atrocités il avait eu à subir... Les différences seules entre les marques attestaient de longues séries de tortures et de souffrances. Pourquoi avait-il eu à subir tout ça? Elle fit demi tour, tournant également le dos à Reyn.

"Il doit y avoir de quoi soigner ceci dans la trousse de secour."

Et sans un mot supplémentaire, elle longea le court couloir jusqu'à la porte de la salle de bain et s'y engouffra, se baissant sou l'évier là où trônait une petite armoire. Alors que sa main ouvrait celle-ci, elle se surprit à trembler en imaginant le claquement du fouet. Un son si réaliste dans sa tête qu'elle en sursauta presque. Non, elle n'avait jamais eu le fouet. Jamais les coups qu'on lui infligeait ne laissait de trace trop visible, cela aurait déplu à son ancien maître. Mais la douleur revenait encore, cette douleur que seuls les souvenirs peuvent éveiller. Qui sait alors le degré de monstruosité que le Guépard allait encore souffrir pour le reste de sa vie? Elle réprima un début de tremblement et agrippa une grosse boîte blanche sur laquelle une croix rouge se délavait. Rapidement elle referma l'armoire et sorti de la salle de bain pour revenir dans ce petit couloir.

"Il faudra commencer par désinfecter avant de mettre une pomade cicatrisante. si vous voulez bien vous allonger sur le lit, je vais m'en occuper."

Finalement, mieux valait pour Reyn de tourner le dos à Nyarai. Ainsi, il ne voyait pas son expression d'horreur, voire de pitié. Ca, il ne le supportait pas. Elle murmura qu'elle avait ce qu'il fallait, avant de s'éclipser. Il tendit l'oreille et ferma les yeux, comme pour suivre les mouvements de la lionne. Elle revint peu de temps après et lui expliqua ce qu'elle allait faire. Il hocha la tête à sa proposition, même s'il aurait très bien pu rester debout.

Sans la regarder, il alla droit vers la couchette et après un instant d'hésitation, il posa un genou dessus, avant de s'allonger à plat ventre. Ses mouvements étaient un peu raides encore. Il lui faudrait encore un peu de temps pour retrouver toute sa souplesse féline.

- "Je suis désolé de vous causer autant de tracas Nyarai... Vous avez peut-être le spectacle qui vous attend? je ne voudrais pas vous mettre en retard..."

Mais en vérité, l'idée de se retrouver seul ne lui plaisait pas plus que cela.

Gentiment, Nyarai se rapproche et s'assit sur le rebord du lit. Le dos à l'horizontal alait lui permettre de mieux voir les blessures et surtout d'y avoir accès plus facilement. Elle posa la grosse boîte sur ses genoux et l'ouvrit, considérant son contenu. Ouate, désinfectant, il faudrait commencer par ça avant dappliquer une pommade cicatrisante. elle attrappa le flacon de désinfectent et l'ouvrit avant de répondre.

"Le spectacle ne commence qu'une fois la nuit complète. Et je ne passe qu'après l'entracte, donc je ne suis pas pressée."

Elle avait encore du temps, elle était vite habillée de toute manière. Même si déjà les voix des spectateurs se mêlaient aux cris du vendeur de barbes à papa de l'autre côté du châpiteau. Nyarai saisi un morceau de ouate qu'elle posa contre le dessus du flacon avant de le retourner, imbibant celui-ci d'un liquide orangé.

"Je suis désolée, mais ça risque de piquer un peu, certaines plaies paraissent assez enflammées."

Avec une petite hésitation, elle se pencha sur Reyn, approchant la ouate des plaies les plus marquées, tamponnant avec précaution. De loin ce ne serait pas une partie de plaisir pour son camarade, elle en avait parfaitement conscience.

Reyn entendit vaguement la réponse de la lionne. Au moins ne la mettrait-il pas en retard. Il s'en serait voulu de lui gâcher sa représentation. Il entendait les bruits du spectacle au loin. Elle le prévint alors qu'il allait avoir mal. Il eut un imperceptible haussement d'épaules. La douleur était une vieille compagne. Cependant, il tressaillit quand elle appliqua le coton imbibé sur la première plaie. Il se mordit la lèvre et ferma les yeux. Le désinfectant ravivait ses blessures alors même qu'il les nettoyait.

- "Il faut bien le faire de toute façon... Mais s'il te plait, essaie de faire assez vite quand même."

La voix du félin était etouffée et assez faible. Il avait l'impression de ressentir à nouveau la morsure du fouet et revit la scène, la douleur, la perte de... Non, il ne devait plus y penser! Il commençait à vivre de nouveau, il ne pouvait pas se laisser abattre par ces pensées parasites.

A nouveau, il se raidit alors que Nyarai effleurait une autre zone enflammée. Seigneur... il avait le dos à vif. Mais c'était nécessaire. Et puis, elle appliquerait par la suite un baume apaisant. Il pouvait bien endurer un peu cette souffrance. Encore un peu...

Les tressaillement du guépard donnait envie à Nyarai de tout cesser là, immédiatement. Pourtant elle n'enf it rien et acceléra sans pour autant perdre de sa prudence et de sa douceur. Il fallait faire vite, c'était nécessaire, bien trop douloureur. Elle passa le coton sur les dernières marques et abandonna celui-ci sur la table. C'était bien douloureux, même si elle n'avait pas de blessure physique, la voix seule du félin suffisait à lui faire ressentir une parcelle, même infinie, de ce qu'il devait endurer.

"Je suis désolée."

Et elle l'était sincérement. Devoir faire du mal... Même si ce n'est que pour guérir, c'est déjà presque trop cruel pour elle. Abandonnant la ouate elle choisit une simple compresse sur laquelle elle étala avec soin une pomade cicatrisante. La fraîcheur allait surprendre, mais elle avait au moins l'avantage d'apaiser la morsure brûlante du désinfectant. Elle ne prévint pas cette fois et recommença prudemment son parcourt sur les plaies, encore plus doucement, étalant à 'aide de la compresse stérile la pomade apaisante. Elle insista un peu plus au niveau des quantités sur les plaies enflammées, créant comme une couche de protection. Il allait falloir laisser agir, au moins le temps que la pomade pénètre convenablement.

"Vous ne pourrez sans doute pas vous lever tout de suite après ça."

A la rigueur, pourquoi ne dormirait-il pas simplement? Il serait en sécurité et personne ne viendrait le déranger. Un repos bien mérité en somme. Et elle irait alors rejoindre la piste. Son oeuvre achevée, elle replia la compresse entre ses doigts.

Reyn se mordit la lèvre au sang quand Nyari s'excusa.

- "Non, il n'y a pas à être désolée. C'est nécessaire."

La torture s'acheva enfin. Il ressentit une fraicheur bienfaisante et se détendit. Il préférait nettement cela. c'était plus agréable et reposant. Pour un peu, il aurait ronronné... Cela s'arrêta trop vite à son gout et il mit un petit temps à comprendre les paroles de la lionne et ce que cela sous entendait.

- "Ah... Dommage, je vais louper ton numéro..."

C'était la deuxième fois qu'il la tutoyait. La première, elle n'avait répondu que par le vouvoiement. Cela la génait-elle? Ou n'avait-elle pas fait attention? A moins qu'elle n'ose pas lui renvoyer la pareille...

- "Merci pour tout Nyarai."

Cette fois, sa voix était légèrement enrouée par la gratitude. Il était totalement sincère.

Nyarai se pencha sensiblement en avant pour récupérer tout ce qu'elle avait utilisé et jeter le tout dans un sac en plastique avant de refermer simplement la boîte blanche dans laquelle elle avait replacé la pomade et le désinfectant. Une vague couleur rose passa rapidement sur ses joues. Oh, le numéro, il l'avait déjà vu non? Du moins il n'y aurait que peu de différence avec ce qui aura lieu un peu plus tard sur la piste. Quant au remerciement, tait-ce vraiment utile?

"Ne me remerciez pas, c'est la moindre des choses."

Normal pour elle, peut-être pas pour tous. Oh, elle relevait tout juste le changement à son égard, ce tutoiement. Pourtant elle ne pouvait se résoudre à en faire de même. Non pas par crainte, juste par volonté de ne peut-être pas trop lier de complicité pour un premier soir. Même si en vérité elle n'avait plus peur, elle ne pouvait s'empêcher de conserver une part de distance, ne serait-ce que par respect. Elle se releva simplement et alla jeter le sac en plastique dans une poubelle avant de revenir sur ses pas et récupérer la trousse des premiers secours.

"Je vais devoir aller rejoindre les autres pour le spectacle. Je tâcherai de ne pas faire de bruit en revenant, vous avez besoin de repos."

Reyn nota qu'à nouveau, elle n'avait pas répondu à son tutoiement. Et la raison lui échappait. Etait-il trop familier? Oui, c'était possible. Il allait devoir garder ses distances. Ce devait être la fatigue qui le faisait se comporter ainsi. En tout cas, elle, elle ne souhaitait visiblement pas qu'ils se rapprochent. Très bien, il se le tenait pour dit.

Elle lui annonça alors qu'elle allait devoir partir. Ah oui, son numéro... Il sourit doucement et hocha la tête. Il ne savait pas trop quoi ajouter. Il se contenta alors de banalités :

- "Merci et bonne chance."

Il reposa la tête sur l'oreiller et ferma les yeux. Dieu qu'il était épuisé. Et pour la première fois depuis des jours, il était en sécurité, au chaud, nourrit et propre. C'était une chance inespérée. Peut-être que le Ciel ne l'avait pas abandonné finalement. Peut-être que...
Ce fut sur cette dernière pensée qu'il glissa dans un sommeil sans rêve et réparateur.

Pour toute réponse, Nyarai n'osa afficher qu'un sourire étonamment détendu pour une fois. Après avoir récupéré la trousse de secour, elle traversa simplement la caravane, attrappant au passage sa tenue de scène dans un placard avant de disparaître dans la salle de bain. Elle rangea simplement le matérie de soin, avec déjà la désagréable impression qu'il faudrait recommencer le lendemain, entre le désinfectant et la pommade. Pauvre du félin! Il allait encore avoir mal longtemps au niveau physique, et certainement pour le reste de sa vie au niveau morale.

Avec un minimum de bruit, elle se changea, enfilant la tenue de spectacle, achevant un semblant de maquillage, et, après avoir pris soin d'éteindre les lumières, elle quitta simplement sa petite demeure, jetant un coup d'oeil soulagée en constatant que Reyn s'était endormi. Demain sera un autre jour pour lui! Elle referma la porte en silence derrière elle avant de s'élancer vers le châpiteau, arrivant dans le petit espace où se réunissait les autres artistes avant d'entrer en scène. En attendant la fin du numéro précédent, elle s'assit simplement sur une caisse, refermant ses bras aurout de ses genoux.

Elle n'avait pas été très gentille, mais elle ne le connaissait pas encore. Elle avait décidément encore bien des choses à apprendre sur le comportement à adopter avec ceux de son espèce. Pourquoi diable avait-elle toujours cet handicape qui en faisait un animal de compagnie et pas une créature comme les autres, aspirant à la liberté? Mais elle fut vite tirée de ses pensées, c'était à son tour d'entrer en piste...

[Fin du topic?]