Reviens après 6 ans d'absence

Le cirque...Opale n'avait jamais aimé le cirque...Trop bruyant, trop de monde. Avec son sac sur l'épaule, elle avançait se frayant un chemin en jouant des coudes. Les vendeurs l'apostrophiait en lui criant:

"Mademoiselle, regardez mes belles peluches...Regardez !"

Refusant d'un simple signe de la tete, elle continuait son chemin parmis cette foule dont les trois quarts étaient des enfants qui hurlaient, trepignaient dans l'espoir de voir un clown, un trapeziste...Ces gens qui étaient extraordinaire a leur yeux alors qu'ils sont au fond, des etres humains tout comme eux. Bizarrement, Opale ne croisa aucune caravane qui comportait une race de felin. Quand elle sorti enfin de cette atmosphere qui lui parraissait etouffante, la jeune femme alla s'assoir sur un banc. La tristesse et la lassitude que laissait entrevoir le regard d'Opale contrastait avec les regards plein de joie des enfants. Elle leva son regard et le posa sur la rue. Elle était revenue, revenue dans cette ville dont elle ne voulait plus entendre parler. Opale était de retour a Paris...

Algol se promenait d'un pas léger près des cages vides qui contenaient des fauves à peine quelques jours auparavant. La créature y sentait encore le sauvage parfums des lions des léopards... et bien sûr des tigres. C'était Algol qui les avait lâchés dans le cirque. Il l'avait fait sur un coup de tête, parce qu'il s'ennuyait et qu'il avait envie de voir les têtes des humains lorsqu'ils se rendraient compte qu'ils n'étaient plus des prédateurs, mais des proies... Néanmoins, il avait tout de même attendu que le cirque eût fermé et que les enfants se fussent éloignés: quelle que soit l'espèce, les petits bénéficiait à ses yeux de la présomption d'innocence. Même si certains étaient capable d'attacher leur créature pour les battre comme des grands... Algol resserra légèrement les mâchoires.

*N'y pense plus. Ce n'est pas la peine.*

"Eh, toi là! Arrête-toi!"

Le sous-chef de la Thianra tourna nonchalemment la tête vers celui qui l'avait interpellé. Un homme, grand et bien proportionné, à la musculature imposante qui saillait sous son tee-shirt. Il sentait le fauve: c'était un dresseur du cirque, à présent au chômage. Il s'approcha à grands pas d'Algol, l'air contrarié. Il tenait un fouet roulé dans sa main droite.

"Qu'est-ce que tu fiches ici? Ton maître doit te tenir en laisse dans l'enceinte du cirque! Et pourquoi on ne voit pas ton collier?!"

"Moi aussi je suis ravi de vous rencontrer, monsieur."

Le visage de l'homme se contracta et il laissa son fouet se dénouer pour pendre de ses doigts comme un long et fin serpent.

"Tu te moques de m..."

Algol saisit l'homme à la gorge et serra brusquement, l'obligeant à finir sa phrase dans un gémissement étranglé. Les griffes jaillirent hors de la main de la créature, entaillant au passage la peau sous l'oreille de l'humain, qui supporta la douleur avec un admirable self-control. Il semblait juste complètement ahuri. Algol découvrit les crocs et murmura en détachant bien les mots:

"Ne t'avise jamais de m'approcher avec un fouet en main, humain. Jamais."

Sa main libre arracha l'arme de l'homme et la jeta au loin, pendant que de l'autre il serrait un peu plus fort la trachée de sa proie...

Opale avait assister a toute la scene avant de se lever et se frayer un chemin entre les personnes qui avaient former un cercle autour du dompteur et de la creature. Un claquement d'air se fit entendre alors que le fouet du dompteur s'enroulait autour du poignet d'Algol. La jeune femme en tenait l'extremiter et tira violement dessus, faisant lacher prise a la creature. Le dompteur retomba lourdement au sol et s'enfuya sans demander son reste. Opale fixait Algol dans les yeux, bien que ses pupilles en fente lui rappelait celle de son jeune frere qu'elle avait toujours detester. Un leger sourire provocateur se dessina sur les levres de la jeune femme qui tirait toujours plus fort sur le fouet forcant son ennemi a approcher.

"Laisse ses humains en paix, il ne t'on rien fait !"

Le sourire d'Opale se transforma peu a peu en un rictus de haine. Elle regarda son collier mais elle avait du mal a croire qu'Algol soit domestiquer. Il était rare en effet de voir des creatures domestiquer se balader sans leur maitre.

"Qu'est-ce que tu fait ici ?"

Il avait vu trop tard l'humaine se précipiter vers lui. Le fouet avait claqué dans l'air et s'était enroulé autour de son poignet droit, mordant sa peau au passage. La brûlure du cuir sur sa chair fit tressaillir Algol (*non, attendez, je n'ai rien fait de mal!*), qui n'eut même pas la présence d'esprit de résister lorsque Opale tira sur le fouet pour l'éloigner de l'humain.

"Laisse ces humains en paix, il ne t'ont rien fait !"

Il lui fallut rencontrer le regard haineux de la jeune femme pour réagir enfin. Son visage se contracta d'une manière qui n'avait rien d'humain, transformant ses traits harmonieux en un museau furieux.

"Je ne t'ai pas autorisée à me tutoyer, il me semble."

Il retroussa les babines pour découvrir les crocs et il arracha violemment le fouet de la main d'Opale, qui le tenait pourtant solidement. Ses griffes jaillirent, provoquant des cris paniqués et un mouvement de recul autour de lui. Mais il ne s'en servit que pour trancher la lanière de cuir qui lui meurtrissait le poignet. Il ne haïssait rien tant que les fouets: il n'y avait été confronté qu'une fois "pour de bon", mais son dos en portait encore les cicatrices. Ils étaient courants dans cette section réservée aux grands fauves et Opale n'aurait aucun mal à s'en procurer un autre, mais Algol tint tout de même à achever de découper celui-ci en quelques coups bien précis. Puis il se redressa et rajusta d'un geste machinal son foulard pour dissimuler son collier. Son visage avait retrouvé une dangereuse stabilité. Seuls ses yeux brûlaient, démentant son ton presque neutre:

"Ne refais jamais ça, humaine..."

Opale avait avancer de quelques metres quand Algol avait tiré violement sur le fouet. Elle avait été contrainte de le lacher sous peine d'etre a porter de griffes de la creature. Son sourire narquois contrastait avec son regard haineux. Qu'est-ce que cette creature faisait là ? Elle n'en n'avait aucune idée et bien qu'elle lui ai poser la question, elle s'en fichait eperduement. Elle fixait toujours Algol, ne voulant pas la lacher du regard.

"Parce que j'ai besoin d'autorisation pour te tutoyer ? Pour qui tu te prend ?"

Derrière Algol se trouvait un second fouet, il avait l'air bien plus solide que le precedent. Elle se fit alors a faire des pas laterals, esperant atteindre le fouet avant que l creature s'en rende compte qu'il y en ai un juste derrière lui.

Algol décala légèrement sa jambe arrière pour se procurer un meilleur appui et se ramassa sur lui-même, prêt à bondir en cas de besoin. Il évitait d'ordinaire de se battre en public, mais cette fille avait osé l'attaquer avec un fouet. Il ne pouvait laisser passer une chose pareille.

"Je me prends pour quelqu'un que tu te crois en mesure de châtier pour la simple raison qu'il va où bon lui semble."

Opale tentait de le contourner. Il suivit son mouvement: si elle pensait pourvoir passer derrière sa garde d'une manière aussi grossière... Non, elle paraissait plus intelligente que cela. Les yeux d'Opale semblaient à la fois surveiller Algol et chercher autre chose, comme si... La créature tourna vivement la tête et vit le fouet accroché derrière-lui.

*Merde!*

Il plongea pour s'interposer entre l'humaine et l'arme, mais il était un tout petit peu trop court...

Opale profita de la chute de son adversaire pour aller s'emparer du fouet. Elle prit de l'élan et fit un bond par dessus Algol. La jeune fille se saisit du fouet et le fit une nouvelle fois claquer dans l'air. Elle s'approcha de la creature et s'arreta a quelque centimetre de lui. Acte aussi fou qu'inconsiant étant donner la carrure du jeune homme comparere a la sienne mais la force ne faisait pas tout dans ce genre de combat.

"Je n'ai pas envie de te chatier mais plutot de te faire payer ce que tu as fais a ce dompteur qui ne t'avais rien fait... Allez releve toi !"

Elle fit une nouvelle fois claquer son fouet. Pendant les 6 ans qu'elle avait passer hors de Paris, Opale avait apprit a se servir de ce genre d'arme qui se revelait fort utile contre les creatures.

Algol ne se releva pas. Opale ne semblait pas consciente qu'il était plus dangereux ainsi que debout. Allongé au sol, il bénéficiait de ses quatre membres pour lutter. Les mains que le jeune homme appuyaient sur le sol et les jambes qu'il avaient imperceptiblement fléchies disposaient d'une puissance aussi importante que les pattes du léopard dont il était issu et lui assuraient une détente sans comparaison humaine possible. Il montra les crocs à Opale, et il entendit une voix enfantine dire sur sa gauche:

"Papa, pourquoi le lion il est en colère?"

L'homme ne jugea pas utile d'instruire son enfant en lui expliquant la différence entre un lion et une créature, ce qu'Algol trouva déplorable. Il ne bougea pas d'un pouce, impassible. Jusqu'à ce qu'un frémissement d'impatience dans le bras d'Opale lui apprît qu'elle allait bientôt frapper. Il gronda:

"Je n'agresse que ceux qui m'agressent."

Agol bondit avec un feulement sauvage. L'humaine s'était approchée trop près, et sa bravade fit qu'elle ne réussit pas à éviter totalement le coup de la créature: il la griffa au flanc gauche, des égratignures superficielles par rapport à ce qu'il aurait pu faire, mais il n'avait pas frappé pour tuer. Il retomba avec une roulade et s'arrêta sur un genou à la limite de la portée du fouet, son regard couleur ambre fusillant la jeune femme.

"Dernier avertissement: pose ce fouet et nous en resterons là. Si tu crois que je vais me laisser dompter comme un bon gros chat..."

Opale n'avait pas senti le coup venir. Elle posa sa main a l'endroit où Algol l'avais frapper et du sang tacha sa peau blanche. La jeune femme releva la tete et posa son regard noir sur le creature. Son fouet fila dans les airs et claqua contre la joue d'Algol. Elle serrait le fouet toujours plus fort, elle ne se ferais pas avoir deux fois.

"Tu attaque seulement si l'on t'attaque ? Et qu'est-ce que t'as fait le dompteur ?"

Elle était stoique alors que son regard fixait Algol. Son sang coulait le long de son flanc et retombait par terre en un petit bruit. Ploc...ploc...ploc...Mais elle n'en pretait pas attention, elle la reprotait sur la creature.

Algol fit un bond en arrière avec un autre feulement, mélange de douleur et de fureur. Sa main frôla sa joue gauche et il grimaça en y sentant l'entaille que lui avait fait le fouet. Mais il était hors de portée, pourtant!

*Comment a-t-elle pu me toucher?!*

Algol se rendit compte que sa respiration s'accélérait dangereusement et il s'obligea à se calmer. Il y avait trop d'humains potentiellement innocents ici, trop d'enfants pour qu'il se permît une crise de schizophrénie. Le plus sereinement possible, il étudia la position d'Opale. Puis il comprit. Elle avait avancé le pied droit au moment de frapper, un geste pratiquement impossible à voir mais qui rallongeait la portée de son fouet d'au moins quarante centimètres. Largement assez.

"Je vois que tu sais te servir de cet instrument barbare... Comme le dompteur savait le faire. Si l'on te menace parce que tu commets le crime de te promener en liberté, comment réagis-tu, toi?"

Il se redressa, les points serrés.

"Je suis bien gentil de répondre à tes questions stupides, je trouve... Lâche ce fouet!"

Obeir a une créature, ca jamais ! Elle ressera le fouet et le fit claquer une nouvelle fois, elle avait compris qu'Algol avait une sainte horreur de ce bruit. Elle s'avança, la demarche impetueuse et la tete haute. La jeune femme souria en voyant l'entaille sanguinolante que ce fouet avait laisser sur la joue de le creature.

"Hé bien, qu'est-ce qui t'arrive mon gros minou ? Tu as peur du petit fouet..."

Son ton était ironique et elle lança le fouet qui s'enroula autour de la cheville d'Algol et elle tira violement dessus, forcant celui retomber au sol. La foule, de plus en plus effrayée par ce qui se passait emmenait les enfants le plus loin possible. Le cirque fut bientot desert. Opale tenait fermement son fouet dont le cuir lui meurtrissait la paume de la main.

Algol sentait sa maîtrise de soi s'effilocher doucement, mais sûrement. Le commentaire railleur d'Opale lui fit serrer les dents avec tant de violence que ses crocs en grincèrent et que les cheveux qui descendaient sur sa nuque se hérissèrent.

*Très bien, elle veut la guerre, elle va l'avoir!*

Il se redressa pour bondir, et l'humaine profita de la seconde où ses griffes ne protégeaient plus ses jambes pour envoyer le fouet accrocher sa cheville, avant de tirer violemment. Algol tomba au sol, sur le dos. Mais il ne se laissa pas destabiliser: l'humaine tenait son fouet bien trop serré... Il se plia brusquement en deux avec une souplesse toute féline pour agripper le fouet et tirer à son tour. Opale perdit l'équilibre et s'étala dans la poussière. Mais elle ne lâcha pas son arme. Algol s'accroupit d'un coup de rein et sourit.

"On mord la poussière, mademoiselle la dresseuse de fauves?"

Il bondit sans attendre davantage. Opale eut le réflexe de le déséquilibrer en racourcissant le fouet, mais il y avait trop de mou sur lanière pour que la créature soit interrompue dans son saut. Algol fondit sur la jeune femme, ses griffes gauches se plantèrent dans le bras droit exposé pour clouer son adversaire au sol, tandis que l'autre poing visait le ventre...

Opale poussa un hurlement de douleur quand les griffes d'Algol se plantèrent dans son bras. Elle reflechissait a toute vitesse a un moyen d'éviter le poing de son adversaire. Opale ramena alors ses genoux a son menton et attendit le bon moment avant d'envoyer ses pieds dans le ventre de la creature le projetant a quelque metres de là. Elle se releva. Son bras blesser pendait mollement le long de son corps alors que son sang degoulinait le long de ses doigts fins et pale. Un sourire vint se peindre sur ses levres. Finalement, elle n'avait plus tellement envie de faire payer son acte a Algol mais plutot d'essayer de le dresser, c'était surement son ancienne passion qui refaisait surface. La jeune femme ressera son fouet et fixa les pupilles fentées de son adversaire.

"Mademoiselle a un prenom, elle s'appelle Opale !"

Essouflée et avec un bras en moins, elle se tenait a quelques metre de la creature. Elle regardait un peu partout, cherchant un moyen de se defendre avant de finir en patée pour chat mais il n'y avait rien de très interressant dans ce cirque a part des cages vides.

*Des cages ! Mais oui, bien sur ! Je vais mettre cet animal en cage !*

Opale fit alors un imperceptible mouvement de recul, se rapprochant des cages.

Algol roula sur le mélange de sable et de paille qui recouvrait le sol, dérapa en essayant de se réceptionner, fit une autre roulade et finit tant bien que mal à quatre pattes, couvert de poussière, légèrement étourdi et une méchante douleur dans l'abdomen à chaque fois qu'il inspirait. Mais il souriait: le fouet n'était plus en contact avec sa chair et il avait repris l'avantage dans le combat.

"Gros minou a un nom, et il s'appelle Algol!"

La bouche entrouverte pour mieux respirer, il se redressa pour retrouver sa position de garde habituelle, les jambes fléchies, les bras arqués et le haut du corps légèrement en avant de son centre de gravité. Courageuse, l'humaine s'était relevée et avait saisi son fouet de l'autre main. Mais elle n'en menait pas large, Algol pouvait le sentir. Elle cherchait un moyen de renverser à nouveau la situation à son avantage, mais la créature ne comptait pas lui en laisser le temps. D'autant plus qu'il n'aimait pas le sourire qu'arborait maintenant Opale en le regardant. On y lisait presque... de la convoitise...

L'humaine fit un pas en arrière, s'approchant d'une cage vide sur sa droite. Sans doute pour fermer l'angle d'attaque qu'offrait son bras inerte. Algol profita de cette fraction de seconde où le cerveau de l'humaine gérait sa nouvelle position pour l'attaquer à nouveau. Le fouet claqua, mordit le flanc de la créature sans pour autant déchirer la peau protégée par deux couches de tissu. Là était la faiblesse du fouet: il était rapide, il faisait peur, il faisait mal, mais il ne pouvait pas blesser sérieusement en un seul coup, contrairement aux griffes... Celles d'Algol sifflèrent et accrochèrent la chemise d'Opale lorsqu'il la frôla.

*Manqué.*

Algol fit un roulé-boulé pour se relever tout de suite dans la bonne direction et bondir sur Opale, crocs découverts. Cette fois...

Pour echapper au crocs d'Algol, Opale couru et se jeta au sol. Elle roula sur le sol, son bras ensanglanté laissa une trace rougâtre sur le sol. Opale se trouva a present devant la cage. Son bras la faisait terriblement souffrir et elle perdait de plus en plus de sang, il fallait vite qu'elle enferme cette créature. Sur son visage, on pouvait lire une fatigue de plus en plus presente mais surtout une grande determination. Elle était determinée a dresser Algol et a en faire un bon chat de compagnie. Elle fit claquer une nouvelle fois son fouet et frappa la creature au flanc. Le vetement déjà bien abimé d'Algol ne suffisa pas a le proteger cette fois et le cuir meurtri sa peau en laissant une grande trace sanguinolante. Elle arborait toujours ce petit sourire bien qu'elle était visiblement en difficulté face a Algol.

"Alors, je suis enchantée de faire ta connaissance Algol !"

Son ton était encore plus cinglant et plus ironique qu'au debut de ce combat. Opale avait bien compris que son humour agaçait son adversaire et elle s'en servait pour le faire s'enerver et qu'il commette une erreur pour qu'Opale puisse retourner la situation en sa faveur.

Algol rugit de douleur lorsque la lanière de cuir trouva le chemin de son flanc déjà meurtri, mais il ne prit pas le temps de se préoccuper de sa souffrance: l'humaine commençait à faiblir et son sang coulait de plus en plus abondemment sur le sol du cirque. Il prit son élan et s'élança lestement vers Opale pour l'achever, sans prêter attention à cette partie de son instinct qui lui hurlait de se méfier du sourire déterminé de la jeune femme. La cage derrière-elle n'était qu'un élément du décors, sans pl...

*La porte! Elle est devant la porte ouverte!*

L'humaine s'apprêtait déjà à plonger pour laisser passer son adversaire au-dessus d'elle, Algol put le lire dans chacun de ses muscles. Il réagit au quart de tour et brisa son élan d'un coup de rein pour ne pas s'écraser directement dans la cage. Mais il avait compris trop tard la manoeuvre d'Opale: il atterrit en plein dans l'estomac de l'humaine et ils culbutèrent tous les deux entre les barreaux d'acier.

Et tous deux se retrouvèrent allongé sur le sol sale de la cage. Sous la violence du choc, la porte se referma. Après quelques secondes d'etourdissement Opale se releva et s'elança vers la porte, elle la secoua violement dans l'espoir de l'ouvrir mais rien ni faisait. Il fallait qu'elle se rende a l'évidence: Elle était enfermée dans une cage avec une créature qui voulait sa mort. Affaiblie par son abondante perte de sang, elle glissa le long des barreaux et se retrouva a genoux par terre. Adieu son beau sourire determiné et son air arrogant. Elle laissa echapper un petit rire nerveux et elle se retourna pour fixer Algol dans les yeux. Quitte a mourire autant le faire dignement.

"Allez tue moi...Tu en meurt d'envie depuis le debut du combat...De plus, je ne suis plus armée..."

D'un signe de tete, elle designa le fouet qui lui avait echapper lors de sa chute et qui reposait sagement sur le sol a quelques metre de là. Elle se redressa en s'aidant des barreaux et de sa seule main encore valide. Elle fixait toujours Algol mais un leger sourire apparu sur ses levres. Finalement, elle n'y sera pas rester longtemps a Paris. Quand soudain, l'image de sa mère lui apparu devant les yeux, surement une hallucination due a sa blessure. Non, non elle n'avait pas le droit de mourir comme ça, Opale devait se battre pour elle. Elle inspira profondement, comment sortir de cette mauvaise passe sans y laisser la vie ?

Silencieux, Algol fit quelques pas de côté sans quitter Opale du regard. Il poussa vivement le fouet du bout du pied, l'expédiant contre les barreaux. Puis il se déplaça encore et, à présent hors de portée de toute tentative désespérée de l'humaine, se baissa pour ramasser l'arme et la jeter le plus loin possible hors de la cage. Il l'avait fait aussi vite que si le fouet l'avait brûlé.

Il s'autorisa alors à examiner l'humaine plus attentivement. Elle avait déjà perdu beaucoup de sang, et elle en perdait encore. Algol avait dû trancher une artère en frappant. Et pourtant, malgré la pâleur alarmante de son visage, Opale luttait pour rester sur ses jambes.

*Courage admirable ou bêtise absolue?*

Quoi qu'il en soit, elle avait raison: elle avait imaginé un piège audacieux, mais celui-ci s'était refermé sur elle. Algol sentait toutes ses constantes physiques revenir à la normale, son coeur se calmer, sa respiration se stabiliser. Sa rage s'éloigner. Les traits de son visage balafré retrouvèrent bientôt leur expression habituelle, bien douce en comparaison du rictus de fureur qu'il avait arboré pendant le combat. Il restait parfaitement silencieux, comme pour mieux contraster avec le rire nerveux qui agitait Opale.

Lentement, posément, il s'approcha de l'humaine. Sa main droite se leva et ses griffes teintées de rouge vinrent s'appuyer contre la gorge de la jeune femme. Celle-ci continua malgré tout de le regarder bien en face, pupilles rondes dans pupilles longilignes. Les griffes d'Algol ne s'enfoncèrent pas. Elles ne reculèrent pas non plus. Il se rendit alors compte qu'un grondement continu s'élevait dans la cage, et que ce grondement provenait de sa propre gorge.

"Je suis un idiot de ne pas t'arracher la tête sur le champ: tu ne te priverais pas pour le faire si nos rôles étaient inversés. Mais moi je ne suis pas un humain: je ne tue pas inutilement."

Il avait parlé d'une voix basse, à peine voilée de haine. Il vit un sourire se former doucement sur les lèvres d'Opale et un éclair passa dans ses yeux ambrés. Il appuya un peu plus sur le cou vulnérable, entaillant la peau juste assez pour faire couler le sang.

"Néanmoins, je me demande si je ne vais pas faire une exception pour toi."

Elle le fixait toujours. Opale tenait sur ses jambes mais cela relevait du miracle, elle était au bord de l'évanouissement. Sa main agrippa alors l'avant bras d'Algol, la poigne de la creature l'empechait presque de respirer. Elle ferma les yeux de douleur. Ce piège aurait pu marcher mais la jeune femme avait sous estimer la presence d'esprit de la creature et cela lui arracha un autre leger sourire, a peine perceptible.

"Je..ne voulais...pas te tuer...Seulement...t'apprivoiser..."

La voix d'Opale était saccadée et a present elle voyait floue. Algol avait été plus fort, voila où son arrogance l'avait menée. Elle était enfermée dans une cage avec une creature. Mais celui ci se trompait sur elle, elle non plus n'était du genre a tuer inutilement. Elle entendit a peine la dernière phrase d'Algol, sa main glissa et retomba le long de son corps alors que ses yeux se fermèrent. Elle était inconsiante mais respirait encore, Algol pouvait sans doute sentir le pouls de la jeune femme sous ses doigts bien que celui ci soit faible. Le cirque commençait peu a peu a se remplir pour la representation du soir et les quelques personnes déjà presente se pressait près de la cage pour voir ce qu'il se passait. Une fillette tira sur la jupe de sa mère et lui demanda:

"Maman...Pourquoi le monsieur il a tuer la madame ?"

Sa mère ne prefera pas repondre et regardait le "spectacle" aussi stupefaite que les autres personnes y assistant elles aussi.

Le murmure d'Opale surprit Algol, bien plus qu'il ne l'aurait pensé possible. Elle avait dit cela sur un ton si étrange... le ton d'une petite fille qui commence à grandir et qui se montre ironique pour cacher sa déception de ne pas avoir eu le jouet qui lui faisait envie.

"M'apprivoiser?"

L'humaine perdit connaissance, et Algol était si troublé qu'il faillit la laisser s'empaler sur ses griffes. Il les rentra prestement et parvint à rattraper Opale au niveau des épaules avant qu'elle ne s'écrase au sol. Il posa un genou à terre pour déposer la jeune femme sur la paille défraîchie. Surprenante issue pour un combat. Il avait gagné, mais de peu. Si par malheur il avait mis une seconde de plus à comprendre ce qu'Opale voulait faire...

Il se releva et jeta un regard panoramique sur les humains qui commençaient à environner la cage. Tant de stupéfaction dans les regards... un étonnement qui n'allait pas tarder à devenir de la haine. Algol ne devait pas traîner ici. Il enjamba le corps inerte d'Opale pour aller saisir les barreaux de la porte.

*Ces choses sont capables de résister aux coups d'un lion qui pèse quatre fois mon poids, je ne risque pas de les déformer à main nue. Peut-être avec un sacré coup de griffes...*

C'est alors que ses yeux se baissèrent sur le verrou et un sourire naquit sur ses lèvres: un bête système de taquet (les fauves ne savent pas soulever les loquets) qui s'était rabattu lorsque les antagonistes étaient tombés dans la cage. Opale devait être au bord de l'évanouissement pour ne pas s'être rendue compte qu'elle pouvait sortir quand elle le voulait.

Algol rit avec douceur et passa un bras entre les barreaux pour ouvrir la porte. Il fit un pas au-dehors, regardant bien dans les yeux les humains qui l'entouraient. Aucun ne dit quoi que ce fût. Il allait partir lorsqu'un gémissement dans son dos le fit s'immobiliser.

*Les humains s'occuperont d'elle, fiche le camp.*

L'odeur de sang commençait à se répandre dans l'air autour d'Algol. Pas cet effluve parfumé qu'émet la viande fraîche, mais la senteur malsaine d'un prélude à la mort.

*Jamais l'ambulance ne sera là assez vite. Regarde-les ces idiots, ils n'ont même pas encore réagis, personne n'a appellé ni les secours, ni les Arnaiths.*

Il hésita encore une seconde, puis fit demi-tour en jurant entre ses dents et en se traitant de tous les noms. Quel beau sous-chef de la Thianra il faisait, vraiment! Mais il ne pouvait pas laisser Opale mourir ainsi. C'était digne d'un humain, ça. Et puis, quelque chose chez cette jeune femme l'intriguait, cette espèce de mélange de haine et de fascination qu'elle avait pour les créatures...

La respiration de l'humaine se faisait plus silencieuse de seconde en seconde, et son sang s'écoulait toujours hors de son corps. Algol la souleva dans ses bras et quelqu'un trouva enfin le courage de l'interpeller.

"Qu'est-ce que tu fais? Repose-la tout de suite!"

Algol ne prêta aucune attention à l'homme et s'éloigna d'un pas vif, alerte comme s'il ne portait que son propre poids. Il prit son élan et bondit par-dessus un chapiteau secondaire avant de disparaître dans la foule d'une rue transversale.



[ l'Hôpital]